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Malaise autour de Macky Sall entre les pro et les anti-report de la présidentielle

Vendredi 9 Février 2024

Plusieurs cadres du pouvoir sénégalais ont rompu avec leur camp après l’annonce, par le chef de l’État, du report du scrutin. Certains de ses proches avaient pourtant tenté de le dissuader.


« Vous restez le candidat de notre majorité présidentielle. »  Ce 7 février, en avant-propos du Conseil des ministres, Macky Sall a renouvelé sa confiance à son Premier ministre, Amadou Ba. Les premiers mots du chef de l’État étaient attendus, alors que des rumeurs faisaient état, depuis plusieurs jours, de brouilles entre les deux plus importantes personnalités politiques du pays. Ces derniers avaient déjà échangé le 4 février puis le 5, à l’occasion du Conseil présidentiel de sécurité.


Mais c’est la toute première fois que le gouvernement se réunissait après l’annonce de Macky Sall, le 3 février, de l’annulation du scrutin présidentiel qui devait se tenir trois semaines plus tard. Le report n’a fait l’objet d’aucune concertation au sein de la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar.


Audiences refusées
La décision a donc surpris certains ministres, assure l’un d’entre eux : « Personne n’y était préparé. Aucun d’entre nous ne peut dire qu’il était au courant de ce qu’allait dire le chef de l’État ». Notre source admet toutefois que plusieurs signaux laissaient penser que l’élection pourrait ne pas avoir lieu. À trois jours du démarrage de la campagne, aucun moyen financier ou logistique n’avait été fourni aux cadres de la majorité. « En temps normal, nous les recevions au plus tard une semaine à l’avance. »

De quoi susciter des doutes, voire de l’inquiétude, au sein de l’exécutif. La veille de l’annonce présidentielle, certains ministres, comme Doudou Ka (Économie) et Thérèse Faye Diouf (Développement communautaire) ont fait publiquement part de leur position favorable à un report. D’autres responsables de la majorité, dont le ministre de l’Éducation Cheikh Oumar Hann ou l’ancienne ministre de la Microfinance, Zahra Iyane Thiam, ont quant à eux fait état de leur opposition.

Ces deux cadres de BBY font partie d’un groupe proche d’Amadou Ba. Selon nos informations, ils ont échangé avec d’autres responsables défavorables à un report, dont le frère de Macky Sall Aliou Sall, son conseiller El Hadj Kassé, responsable de la communication pour la campagne du Premier ministre, et le ministre de l’Urbanisme Abdoulaye Saydou Sow.

Quelques jours plus tôt, Aliou Sall avait exprimé publiquement, dans un entretien accordé à la chaîne Dakar actu, son désaccord quant à un éventuel report. « Ceux qui se manifesteront ouvertement pour soutenir un report de l’élection auront affaire à moi. Ils sont les premiers ennemis du président Macky Sall », avait déclaré le membre du secrétariat national exécutif de l’APR. Il ne s’est pas exprimé publiquement depuis mais il pourrait, selon l’un de ses proches, quitter le parti présidentiel.

Certains de ces responsables ont sollicité une audience avec le chef de l’État peu avant qu’il ne rende sa décision publique. Selon nos informations, ce dernier a refusé de les recevoir. « Il a tout verrouillé. Il était clair que sa décision était prise », regrette l’un d’entre eux.

Démissions en série
Après l’annonce de Macky Sall, un malaise s’est installé au sein de la majorité. Le 6 février, Awa Marie Coll Seck a annoncé quitter ses fonctions de présidente du comité national de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) et de ministre d’État « pour rester en adéquation avec ses convictions personnelles et ses valeurs. […] Le Sénégal mérite de voir son calendrier républicain respecté, même si [le] processus électoral reste à parfaire. » Elle a depuis été remplacée par l’ancienne ministre de l’Économie Oulimata Sarr, débarquée lors du dernier remaniement gouvernemental.


Awa Marie Coll Seck emboîte le pas du secrétaire-général adjoint du gouvernement Abdou Latif Coulibaly, qui chemine aux côtés de Macky Sall depuis 2012. L’ancien journaliste d’investigation a été le premier à claquer la porte, au lendemain de l’annonce du report de l’élection. Son frère, Cheikh Tidiane Coulibaly, est l’un des deux juges du Conseil constitutionnel mis en cause par l’Assemblée nationale.

Membre de la mouvance présidentielle et proche de Macky Sall, dont il a été le ministre de la Culture, le chanteur Youssou N’Dour s’est lui aussi dit opposé au report de l’élection : « Nos rendez-vous démocratiques s’imposent à nous tous et le peuple souverain sera le dernier juge », a-t-il déclaré le 5 février. La députée Ndeye Fatou Guissé, élue sous la bannière du mouvement du roi du mbalax, a d’ailleurs été la seule élue de la majorité à avoir voté contre la loi de report, entérinée à l’Assemblée nationale ce même 5 février.

Clivage entre partis de gauche et libéraux
Les partis de gauche membres de la coalition, regroupés au sein de la Confédération pour la démocratie et le socialisme (CDS), avaient exprimé dès le 2 février leur opposition à tout projet de report, selon eux « juridiquement impossible et politiquement inopportun ». L’un des signataires du communiqué, le député et secrétaire exécutif de la Ligue démocratique, Nicolas Ndiaye, fait d’ailleurs partie des rares députés de la coalition présidentielle à avoir séché le vote.

Deux membres du gouvernement issus d’organisations de gauche ont également exprimé leur désaccord avec le projet. Il s’agit de Samba Sy, chef de file du Parti indépendant des travailleurs (PIT) et du ministre délégué en charge des droits humains, El Hadj Momar Samb, secrétaire-général du RTA-S (Rassemblement des travailleurs africains – Sénégal). « La ligne de démarcation entre l’aile gauche du parti et les libéraux est très claire, souligne un membre de la coalition présidentielle. En se rapprochant du Parti démocratique sénégalais, Macky Sall risque de perdre le soutien des partis de gauche. » Ces derniers restent néanmoins minoritaires au sein de la coalition Benno Bokk Yakaar.


Le ministre du Travail et des Relations avec les institutions, Samba Sy, avait ainsi refusé d’être présent à l’Assemblée le 31 janvier lors du vote de la commission d’enquête parlementaire. S’il a fait le déplacement dans l’hémicycle le 5 février au moment de l’adoption de la loi, le ministre n’a pas prononcé un mot pendant les quelque douze heures de débat. « Beaucoup de gens qui défendent publiquement le report n’y sont en vérité pas favorables mais sont forcés de suivre les positions du chef de l’État », souligne un responsable de premier plan de la majorité. En dépit de sa proximité avec le Premier ministre Amadou Ba, le porte-parole du gouvernement Abdou Karim Fofana a ainsi dû monter au créneau pour défendre le projet de la majorité face à la presse.

Avant que la décision de Macky Sall ne soit prise, il a également reçu l’expert indépendant Alioune Tine. Ce responsable de la société civile, qui se félicite de discuter avec tous les acteurs, joue toujours un rôle de médiateur. Il aurait plaidé pour que le président discute avec tous de la question du report, avant de prendre sa décision. Sans succès.
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