La migration irrégulière, la migration interne, la migration internationale, l’émigration, l’immigration, toute une série de dénominations renvoyant au déplacement de personnes d’un milieu à un autre, quelles qu’en soient les causes (volontaires ou involontaires) ou les moyens utilisés (régulier ou irréguliers). Au fil des années, le Sénégal est devenu un pays de transit, de destination mais également de départ massif des migrants. Les raisons qui poussent les individus à migrer sont connus de tous : crise économique, chômage, pauvreté ect…
Selon l’ANSD, l’incidence de la pauvreté individuelle au Sénégal est de 37,8 en 2018 /2019. En d’autres termes, le nombre de personnes en situation de précarité est élevé par rapport à la population totale. Ce qui dénote une prépondérance de la pauvreté au sein de la population active.
A la pauvreté persistante et le problème de l’employabilité au Sénégal, viennent s’ajouter une crise sanitaire causée par la pandémie de la COVID19 ; exacerbant ainsi les problèmes auxquels sont confrontés les sénégalais (perte d’emploi, diminution du revenu de travail, et les difficultés d’accès aux services sociaux de base).
Les programmes mis en place par le gouvernement du Sénégal pour remédier aux problèmes de l’immigration clandestine ont démontré leur inefficacité ou leur incohérence avec l’augmentation du nombre de personnes tentant désespérément à quitter le pays la recherche d’un meilleur avenir. Selon les Statistiques données par « Alarm Phone », 480 personnes sont mortes sur les eaux sénégalaises en une semaine.
Face à une telle situation, l’Etat et les acteurs œuvrant dans ce domaine ont l’obligation de se pencher sur cette question qui est devenue aujourd’hui une urgence nationale.
Au niveau international, plusieurs mesures ont été mises en place par les Etats d’accueil afin de mieux gérer le problème de l’immigration. Dans les pays de destination des Sénégalais tels que la France, l’Espagne, et l’Italie, les autorités ont adopté des textes qui encadrent l’accès des demandeurs d’asile dans leur espace commun notamment l’espace Schengen ; C ‘est le cas du règlement Dublin. Une agence dénommée FRONTEX (Agence européenne des grades -frontières et garde - côte) a également été mise en place. FRONTEX a pour mission d’aider les Etats membres de l’Union Européenne à sécuriser leurs frontières extérieures. Les agents du Frontex mis à la disposition des Etats membres de l’UE sont chargés de contrôler les migrants qui pénètrent sur le territoire de l’Etat d’accueil et participent à leur enregistrement. Ils doivent également leur porter assistance ou encore organiser leur retour. Tel n’est toujours pas le cas. En effet, l’agence manque de transparence sur ces opérations et des violations flagrantes des droits de l’homme des migrants ont été notées ces dernières années.
Selon l’ONG « See Whats », la priorité de FRONTEX est avant tout d’empêcher les étrangers de fouler le sol européen. L’agence a failli à son devoir qui est celle d’apporter une assistance à ces migrants, les laissant à la merci de l’océan. « See Whats » estime que depuis 2018, la méditerranée, le Sahara et le désert se sont transformés en cercueil ; plus de mille migrants y ont trouvé la mort. A cela s’ajoute le fait que les pays cités plus haut n’ont pas ratifié la Convention sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles de 1990.
On peut en déduire que l’Europe s’est inscrite dans une logique de durcissement en matière de gestion des flux migratoires au mépris des valeurs qui ont fondé ce continent à savoir, l’humanisme et les droits de l’homme. Ces mécanismes vont de pair avec la politique très restrictive quant aux visas octroyés aux migrants sénégalais pour les principaux pays de destination en Europe (France, Italie, Espagne).
Face à ce durcissement des politiques migratoires des « eldorados » du nord, les jeunes sénégalais n’ont d’autres choix que de recourir aux nouvelles stratégies de contournement proposés par des réseaux informels, mettant en péril leur vie.
Au niveau communautaire et régional, on constate un vide juridique concernant l’encadrement et la gestion des flux migratoires en Afrique. La CEDEAO et l’Union Africaine n’ont prévu aucun mécanisme permettant aux Etats membres de combattre le trafic de migrants. Les accords bilatéraux en matière de libre circulation et gestion des flux migratoires ne sont pas non plus coutumiers.
Au niveau national, le même constat s’impose : le Sénégal ne dispose pas d’une politique appropriée laissant ainsi le champ libre à des flux de plus en plus importants et diversifiés de migrants irréguliers organisé par des réseaux de passeurs mus par le seul appât de gains. Ce mépris a causé malheureusement la mort de milliers d’innocents.
Il urge donc de réfléchir à de nouvelles pratiques pouvant permettre de faire face au phénomène migratoire. A cet égard, l’Etat du Sénégal doit privilégier la coopération avec les autres Etats dans le but de renforcer ses capacités en matière de lutte contre la migration irrégulière. Une plus grande transparence dans la gestion des fonds octroyés au Sénégal par l’Union Européenne dans le cadre du partenariat entre l’Europe et l’Afrique (dont le Sénégal est partie) pour lutter contre ce phénomène migratoire doit être privilégiée.
L’Etat du Sénégal doit également faire en sorte que les mécanismes mis en place au niveau du processus de Rabat de 2006 (dialogue euro-africain sur la migration et le développement) et le cadre stratégique actuel notamment la Déclaration politique et le plan d’action de Marakesh 2018-2019, soient opérationnels pour combattre le trafic de migrants.
Par ailleurs, l’Etat du Sénégal devra aussi renforcer le dispositif de surveillance des frontières en adoptant de nouvelles politiques pouvant compléter la loi n° 2005-06 du 10 mai 2005 relatif à la lutte contre la traite des personnes et des pratiques assimilées et à la protection des victimes. Il doit en outre faire de la lutte contre la pauvreté et le chômage une priorité. Aider les jeunes en milieu rural et urbains à trouver un emploi constitue une démarche juste mais l’enjeu est surtout un emploi décent.
La CEDEAO et l’Union Africaine doivent désormais apporter leur pierre à l’édifice en s’épanchant sur la question de l’immigration clandestine. Ils doivent élaborer des mécanismes permettant de gérer, dans l’immédiat le problème. Pour cela, la création d’une structure opérationnelle communautaire à l’image du FRONTEX permettra de réduire l’immigration clandestine.
Une telle agence aura pour mission de coordonner, contrôler les frontières maritimes et terrestres afin d’intercepter à temps, les navires des trafiquants et d’éviter les catastrophes et hécatombes en pertes de vies humaines. Cela aura évidemment un coût mais ça mérite une réflexion. De plus, on dit souvent que l’Etat a toujours les moyens de sa politique ; ce qui manque en général c’est la volonté politique.
Oumy Sya SADIO
Chargée du projet « accès à la justice des migrants »
Amnesty International Sénégal
Selon l’ANSD, l’incidence de la pauvreté individuelle au Sénégal est de 37,8 en 2018 /2019. En d’autres termes, le nombre de personnes en situation de précarité est élevé par rapport à la population totale. Ce qui dénote une prépondérance de la pauvreté au sein de la population active.
A la pauvreté persistante et le problème de l’employabilité au Sénégal, viennent s’ajouter une crise sanitaire causée par la pandémie de la COVID19 ; exacerbant ainsi les problèmes auxquels sont confrontés les sénégalais (perte d’emploi, diminution du revenu de travail, et les difficultés d’accès aux services sociaux de base).
Les programmes mis en place par le gouvernement du Sénégal pour remédier aux problèmes de l’immigration clandestine ont démontré leur inefficacité ou leur incohérence avec l’augmentation du nombre de personnes tentant désespérément à quitter le pays la recherche d’un meilleur avenir. Selon les Statistiques données par « Alarm Phone », 480 personnes sont mortes sur les eaux sénégalaises en une semaine.
Face à une telle situation, l’Etat et les acteurs œuvrant dans ce domaine ont l’obligation de se pencher sur cette question qui est devenue aujourd’hui une urgence nationale.
Au niveau international, plusieurs mesures ont été mises en place par les Etats d’accueil afin de mieux gérer le problème de l’immigration. Dans les pays de destination des Sénégalais tels que la France, l’Espagne, et l’Italie, les autorités ont adopté des textes qui encadrent l’accès des demandeurs d’asile dans leur espace commun notamment l’espace Schengen ; C ‘est le cas du règlement Dublin. Une agence dénommée FRONTEX (Agence européenne des grades -frontières et garde - côte) a également été mise en place. FRONTEX a pour mission d’aider les Etats membres de l’Union Européenne à sécuriser leurs frontières extérieures. Les agents du Frontex mis à la disposition des Etats membres de l’UE sont chargés de contrôler les migrants qui pénètrent sur le territoire de l’Etat d’accueil et participent à leur enregistrement. Ils doivent également leur porter assistance ou encore organiser leur retour. Tel n’est toujours pas le cas. En effet, l’agence manque de transparence sur ces opérations et des violations flagrantes des droits de l’homme des migrants ont été notées ces dernières années.
Selon l’ONG « See Whats », la priorité de FRONTEX est avant tout d’empêcher les étrangers de fouler le sol européen. L’agence a failli à son devoir qui est celle d’apporter une assistance à ces migrants, les laissant à la merci de l’océan. « See Whats » estime que depuis 2018, la méditerranée, le Sahara et le désert se sont transformés en cercueil ; plus de mille migrants y ont trouvé la mort. A cela s’ajoute le fait que les pays cités plus haut n’ont pas ratifié la Convention sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles de 1990.
On peut en déduire que l’Europe s’est inscrite dans une logique de durcissement en matière de gestion des flux migratoires au mépris des valeurs qui ont fondé ce continent à savoir, l’humanisme et les droits de l’homme. Ces mécanismes vont de pair avec la politique très restrictive quant aux visas octroyés aux migrants sénégalais pour les principaux pays de destination en Europe (France, Italie, Espagne).
Face à ce durcissement des politiques migratoires des « eldorados » du nord, les jeunes sénégalais n’ont d’autres choix que de recourir aux nouvelles stratégies de contournement proposés par des réseaux informels, mettant en péril leur vie.
Au niveau communautaire et régional, on constate un vide juridique concernant l’encadrement et la gestion des flux migratoires en Afrique. La CEDEAO et l’Union Africaine n’ont prévu aucun mécanisme permettant aux Etats membres de combattre le trafic de migrants. Les accords bilatéraux en matière de libre circulation et gestion des flux migratoires ne sont pas non plus coutumiers.
Au niveau national, le même constat s’impose : le Sénégal ne dispose pas d’une politique appropriée laissant ainsi le champ libre à des flux de plus en plus importants et diversifiés de migrants irréguliers organisé par des réseaux de passeurs mus par le seul appât de gains. Ce mépris a causé malheureusement la mort de milliers d’innocents.
Il urge donc de réfléchir à de nouvelles pratiques pouvant permettre de faire face au phénomène migratoire. A cet égard, l’Etat du Sénégal doit privilégier la coopération avec les autres Etats dans le but de renforcer ses capacités en matière de lutte contre la migration irrégulière. Une plus grande transparence dans la gestion des fonds octroyés au Sénégal par l’Union Européenne dans le cadre du partenariat entre l’Europe et l’Afrique (dont le Sénégal est partie) pour lutter contre ce phénomène migratoire doit être privilégiée.
L’Etat du Sénégal doit également faire en sorte que les mécanismes mis en place au niveau du processus de Rabat de 2006 (dialogue euro-africain sur la migration et le développement) et le cadre stratégique actuel notamment la Déclaration politique et le plan d’action de Marakesh 2018-2019, soient opérationnels pour combattre le trafic de migrants.
Par ailleurs, l’Etat du Sénégal devra aussi renforcer le dispositif de surveillance des frontières en adoptant de nouvelles politiques pouvant compléter la loi n° 2005-06 du 10 mai 2005 relatif à la lutte contre la traite des personnes et des pratiques assimilées et à la protection des victimes. Il doit en outre faire de la lutte contre la pauvreté et le chômage une priorité. Aider les jeunes en milieu rural et urbains à trouver un emploi constitue une démarche juste mais l’enjeu est surtout un emploi décent.
La CEDEAO et l’Union Africaine doivent désormais apporter leur pierre à l’édifice en s’épanchant sur la question de l’immigration clandestine. Ils doivent élaborer des mécanismes permettant de gérer, dans l’immédiat le problème. Pour cela, la création d’une structure opérationnelle communautaire à l’image du FRONTEX permettra de réduire l’immigration clandestine.
Une telle agence aura pour mission de coordonner, contrôler les frontières maritimes et terrestres afin d’intercepter à temps, les navires des trafiquants et d’éviter les catastrophes et hécatombes en pertes de vies humaines. Cela aura évidemment un coût mais ça mérite une réflexion. De plus, on dit souvent que l’Etat a toujours les moyens de sa politique ; ce qui manque en général c’est la volonté politique.
Oumy Sya SADIO
Chargée du projet « accès à la justice des migrants »
Amnesty International Sénégal