Menu

Serigne Mbaye Sy Mansour: le règne de la rigueur

Lundi 25 Septembre 2017

Véridique est le mot qui revient le plus souvent, quand on parle du nouveau khalife général de la Tijaniya au Sénégal. De ses déclarations, il ressort qu’il ne veut pas que sa dimension maraboutique l’emporte sur les obligations d’un individu soumis aux mêmes prescriptions que ses coreligionnaires et concitoyens.


‘‘Eh bien rappelle ! Tu n’es qu’un rappeleur. Et tu n’es pas un dominateur sur eux’’. En citant les Versets 21 et 22 de la Sourate 88 du Coran, lors de la ziarra générale de Tivaouane, en mars dernier, à peine plus d’une dizaine de jours après le décès d’Al Maktoum, Serigne Mbaye Sy Mansour témoignait du peu d’intérêt qu’il accordait à la charge du califat. Engoncé dans un fauteuil et entouré du défunt khalife, ainsi que de Serigne Pape Malick Sy, cette rencontre sera l’une des rares occasions publiques d’entendre cet homme né en 1932, et de s’assurer que le franc-parler, qui lui est une qualité unanimement reconnue, n’était pas seulement une rumeur persistante. ‘‘La charge ne se cherche pas, elle vient le plus naturellement du monde’’, lançait-il, en ouverture de son discours.

Hier, après deux jours d’incertitude sur qui allait avoir la lourde tâche de présider aux destinées de la Tijaniya, l’autre pressenti au poste, Serigne Sidy Ahmed Sy, se serait désintéressé ; ce fut la délivrance. Un consensus fort qui soulage toute la confrérie et la Umma sur cet homme qui est crédité d’une véracité dans des propos qu’il enrobe rarement. ‘‘Des fois, on a trop de pudeur que ç’est dommageable. C’est difficile et très désagréable, mais il faut qu’on se dise des vérités’’, dit-il en dénonçant la fumisterie du Malin qui, souligne-t-il, prend l’apparence humaine pour saboter des relations personnelles solides. 60 ans après que son père, Serigne Mansour Sy, a quitté ce bas monde, Serigne Mbaye Sy aura la lourde tâche d’incarner, au Sénégal, une confrérie qui compte des millions d’adeptes dans la sous-région ainsi qu’en Afrique du Nord.

Les quelques témoignages glanés çà et là sur l’homme avancent qu’il est moins sensible que son prédécesseur à la chose politique, mais qu’il n’y est pas imperméable. Moustache grisonnante, paire de lunettes et bonnet carré facilitent la reconnaissance faciale du fils aîné de Sokhna Aminata Seck. D’après les témoignages de Cheikh Oumar Sy Jamil, dans un portrait de Cheikh Camara sur le site lessentiel.sn, Serigne Mbaye Sy Mansour est une  ‘‘université vivante, un silo inépuisable de grandeur morale et de vertu. Un ambassadeur infatigable de la Tijaniya et un promoteur inlassable de l’éthique islamique’’.  De ses déclarations, il ressort que Serigne Mbaye Sy Mansour ne veut pas que sa dimension maraboutique l’emporte sur les obligations d’un individu soumis aux mêmes prescriptions que ses coreligionnaires et concitoyens.

Le courage de ses idées

Ses positions libérales sur certaines questions confirment la rumeur d’homme véridique qu’on lui colle partout. Alors que le Président Macky Sall, en campagne pour le second tour de la présidentielle de 2012, affirmait que les marabouts étaient des citoyens ordinaires, et se dépêtrait dans les embarras médiatiques de sa déclaration, le désormais nouveau khalife lui a tendu la perche, en le confirmant. ‘‘Les chefs religieux sont des citoyens ordinaires comme tout le monde. Celui qui veut voir du négatif dans cette déclaration n’est animé que d’une mauvaise intention’’, lit-on dans le journal L’As du 13 mars 2012. Lors des préparatifs de la 114e édition du Gamou, recevant l’ex-ministre de l’Energie Thierno Alassane Sall, il a exhorté les Sénégalais au paiement des factures d’électricité.  ‘‘Si les Sénégalais ne payent pas l’électricité, la Senelec ne peut pas survivre et risque aussi de ne pas avancer. Et s’ils n’honorent pas leurs factures, ils ne pourront pas revendiquer quoi que ce soit.’’

Travailleur et pourfendeur des partisans du moindre effort, Serigne Mbaye Sy Mansour démonte la paresse.  ‘‘Quand on pousse la bonté jusqu’à vous emboucher la nourriture, la moindre des choses est d’en assurer la mastication. Mastiquez pour moi, c’est du jamais vu’’, défendait-il lors de la ziarra, en mars dernier. Toutefois, pour le franc parleur qu’il est, il a demandé à ce qu’on garde les secrets, qu’on ait des pensées positives, et que l’on nourrisse la bienveillance entre bonnes personnes. ‘‘Je n’ai pas fait tous les pays du monde, mais je ne vois nulle part autre de plus pacifié que le Sénégal. Tout le monde ne peut pas être bon, mais tout le monde ne peut pas être mauvais non plus. Sans cela, point d’équilibre et la vie ne serait plus vivable’’, avance-t-il. D’ailleurs, son discours ressemblait plus à un prêche, puisqu’avec force références coraniques, sur la nécessité de craindre le Seigneur et celle de l’union des cœurs, Serigne Mbaye Sy a démontré qu’il n’a aucune envie de s’éloigner de la spiritualité. 

Comme ses dégaines vont dans tous les sens, la presse en a aussi pris pour son grade. ‘‘J’ai une fois écrit une lettre à un journaliste pour lui demander que cette corporation dédie une journée à parler des journalistes. Vous parlez tout le temps des autres, alors que personne ne sait rien de vous. A sa réponse négative, je lui ai dit que c’était hypocrite, puisqu’ils ne dévoilent que les travers d’autres personnes, alors que les gens savent beaucoup sur eux’’, lançait-il sous les applaudissements.

C’est ce khalife ‘‘normal’’ rappelant un dirigeant français qui, initialement, voulait être un ‘‘président normal’’, qui a la lourde tâche de remplacer Abdoul Aziz Sy Al Amine.

Enquete Quotidien
Lisez encore

Nouveau commentaire :







Flux RSS

Inscription à la newsletter