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Le jour où Vital Kamerhe a été emprisonné à Makala

Lundi 3 Avril 2023

Le 8 avril 2020, en RDC, le directeur de cabinet de Félix Tshisekedi était convoqué par un juge pour répondre de détournements de fonds. Le début d’une longue épreuve qu’il a racontée à Jeune Afrique, quelques semaines avant de revenir sur le devant de la scène au poste de vice-Premier ministre chargé de l’Économie.

Ce jour-là, j’avais mis mon réveil à 6 heures pour quitter tôt ma ferme de N’Sele, qui est à une trentaine de kilomètres de Kinshasa. Deux jours auparavant, j’avais refusé de répondre à la convocation du juge qui enquêtait sur mon implication présumée dans des détournements de fonds dans le cadre du programme dit « des 100 jours ». Mais cette fois, alors qu’il me convoquait à nouveau, j’avais décidé de me rendre à son bureau. Je voulais partir discrètement, sans réveiller personne, mais mon fils Didier était debout. Il est donc venu avec moi.


J’ai décidé de passer d’abord par mon domicile kinois. Je ne pouvais pas aller voir le juge en habit de fermier, il fallait que je sois bien habillé : j’étais tout de même le directeur de cabinet du président de ce pays ! J’ai choisi un costume bleu de France. Chemise bleue, cravate bleue, belles chaussures. En fin de matinée, je suis arrivé au tribunal. Le juge était presque étonné de me voir : « Mais vous êtes là ? »

Un coup de téléphone
À 13 heures, l’audition a commencé. Pendant six heures et demie, on m’a questionné sur le Programme des 100 jours, sur les maisons préfabriquées qui n’avaient pas été construites, sur l’argent soi-disant détourné… Sur chaque point, j’avais des réponses et des preuves de mon innocence : je n’étais coupable de rien. J’étais serein.

À la fin de l’audition, le juge a conclu : « Je vais donc vous dire au revoir. » Il était prêt à me laisser partir et voulait juste passer un coup de téléphone. Lorsqu’il est revenu, il a dit aux forces de l’ordre qui étaient dans son bureau : « Conduisez-le à la prison centrale. » J’étais abasourdi. J’étais le numéro deux du pays et on me traitait comme un va-nu-pieds ! Je me suis dit que le monde était méchant.


J’ai quitté le bureau du juge, et j’ai tout de même eu droit à une petite faveur. Au lieu de me mettre dans un fourgon plein de prisonniers, ils m’ont fait appeler une jolie jeep pour m’emmener à Makala. J’y suis monté avec Pacific Kahasha, un de mes proches qui est aussi conseiller de Félix Tshisekedi, et mon fils Didier.

Pacific a appelé le président, qui était très étonné de ce qu’il se passait. Mais il n’interfère pas dans les affaires judiciaires, c’est tout à son honneur. Avant ma convocation, nous avions eu une longue discussion sur les soupçons qui pesaient sur ma personne. Je lui avais dit qu’en s’attaquant à moi, c’était en réalité à lui qu’on voulait faire du mal. J’ai eu raison, car si cette histoire n’était pas arrivée, nous aurions eu un très bon bilan à présenter à la veille de la présidentielle.

Ma veste, ma ceinture et ma Rolex
Nous avons roulé vers Makala. J’ai enlevé ma veste, ma ceinture et ma Rolex, que j’ai confiées à mon fils en lui disant de prendre soin de sa mère. Ma femme, Hamida, n’y croyait pas. Je l’ai eue au téléphone, elle disait : « Mais tu es l’ami du président, tu es son colistier, tu es tout pour lui… »
À 20h56 exactement, je suis entré dans la prison, et à 21h23, après avoir effectué les formalités, je suis arrivé au pavillon 8. Les conditions étaient terribles. Nous étions quarante dans des cellules prévues pour trois ou quatre. Il n’y avait pas une fenêtre, pas d’aération. C’était épouvantable. Je suis allé voir les sanitaires, il n’y en n’avait que trois, qui servaient à la fois de douches et de latrines. Les prisonniers en ont réservé une rien que pour moi tout le temps de mon séjour. Je ne l’oublierai jamais.


Cela a été le premier jour de neuf longs mois, avant que je ne sois remis en liberté provisoire, puis acquitté. C’était dur mais je n’ai jamais perdu la foi. J’aurais pu appeler mes amis, des chefs d’État du continent, des ministres en Europe, mais je ne l’ai pas fait. En plusieurs décennies de vie politique, j’avais déjà chuté de nombreuses fois, mais je m’étais toujours relevé. J’ai toujours su que je sortirais de Makala et que ma situation s’améliorerait. J’en suis convaincu, j’ai un destin, et mon destin est d’un jour diriger ce pays.
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