Menu

LETTRE OUVERTE A Madame Aissata Tall SALL, Ministre des affaires étrangères et des sénégalais de l’extérieur

Mercredi 25 Novembre 2020


Madame  le Ministre,
Ne pas me réjouir et m’abstenir de vous féliciter de votre nomination comme ministre des Affaires étrangères du Sénégal seraient un crime presque parfait. Illustre défenseur des Droits humains et infatigable rempart pour la cause des femmes, votre arrivée au MAESE est une consécration. Je voudrais ainsi, par la même occasion, exprimer mes vifs remerciements au Président de la République du Sénégal pour sa clairvoyance dans le choix porté sur votre personne. Une femme à la tête du prestigieux ministère des Affaires étrangères est une première !


Aussitôt aux affaires, vous avez envoyé un diplomail à tous vos collaborateurs des consulats, ambassades et autres représentations diplomatiques. Cette missive est l’expression manifeste de votre détermination à insuffler au Département et à la diplomatie un nouvel élan dans une démarche totalement inclusive.


C’est cela qui fonde, madame le Ministre, ma volonté de vous adresser cette lettre ouverte et je vous prie d’y trouver l’expression de ma résolution à contribuer au maintien et au ravivement de la flamme de notre diplomatie tel que vous l’avez souhaité.


Votre pugnacité et votre expérience bâties sur un parcours d’avocat respecté donnent à se convaincre que vous avez un solide viatique pour modeler à votre gré la diplomatie de notre pays sous la conduite éclairée du Chef de l’Etat. Vous avez, en effet, répondu présente partout dans le monde pour défendre nombre de causes justes. Et vos plaidoiries résonnent encore dans les esprits.


Il reste toutefois que votre mission au MAESE, pour être couronnée de succès, ne pourra sûrement s’affranchir, Madame le Ministre, d’une introspection voire un état des lieux de la diplomatie sénégalaise aussi bien dans les relations avec les pays hôtes que dans le fonctionnement en interne des ambassades, consulats, représentations diplomatiques et la portion centrale. Ce que vous avez déjà commencé à faire !


Cette tâche n’est pas l’objet de cette lettre ouverte. Mon propos porte sur un partage des différentes expériences vécues au sein du ministère et des ambassades. Il s’agit, en fait, de quelques constats et suggestions aptes, à mon sens, à contribuer au succès de votre mission.
Dans cette « maison », Madame le Ministre, votre premier obstacle est la muraille de béton constituée par les « diplomates de carrière ». Cette catégorie professionnelle tient à tout prix à cette dénomination pour, estime-t-elle, avoir été formée à l’ENA. Et face aux « diplomates de carrière », se dressent les diplomates dits « assimilés », arrivés dans la corporation grâce à la main de Dieu et des hommes politiques. Les sortants de l’ENA les flagellent constamment du regard et par une pratique discriminatoire dans les ambassades et les consulats faute d’avoir été formés à « leur » école.


Pourtant, nombre de ces « assimilés » passent pour être mieux outillés en raison d’un cursus universitaire et professionnelle solide, une expérience avérée dans la conduite d’un service ou d’une direction. Ce n’est, hélas, pas le cas de la plupart des « carriéristes » qui, pieds joints, s’arrachent parfois d’une classe  pour atterrir à…l’ENA par la magie du concours professionnel. De quoi se méfier des costumes somptueux, fortifications d’insuffisances insoupçonnées. D’ailleurs, comment mesurer la compétence d’un diplomate de carrière ? Aucun baromètre connu si ce n’est, comme les « carriéristes » eux-mêmes aiment à le seriner, la maîtrise de la langue de Molière. Il aurait ainsi suffi que l’autorité abandonne le français, aujourd’hui langue officielle de travail, pour que nos diplomates de carrière se retrouvent dans le vide. Leur seul instrument de mesure de la compétence est, hélas, cette langue étrangère férocement combattue par une bonne part de l’opinion africaine. 

     
En vérité, ce Département, à mon humble avis, doit obligatoirement s’ouvrir aux souffles extérieurs féconds. Un journaliste expérimenté, un universitaire trempé aux affaires internationales et même un excellent littéraire devraient avoir la même dignité dans ce ministère. D’ailleurs, par le passé, la DAJC a été longuement dirigée par des universitaires pour surmonter les nombreux écueils du droit international. Quel « diplomate de carrière » enlevé d’une classe ou bardé d’une maitrise fut elle de droit, se risquerait à diriger la DAJC ? Aucun, sans doute !  


L’orgueil expansif des « carriéristes » fait obstacle au brassage des expériences et des parcours professionnels au point d’empoisonner le climat dans les missions diplomatiques et consulaires. Il en résulte, hélas, une bataille de chiffonniers qui plombe la bonne marche du service et affecte, du coup, la rentabilité et l’efficacité de nos représentations diplomatiques dans des pays potentiellement sources de plus-value pour notre économie.


Il est même arrivé dans des ambassades ou consulats généraux que le chef de poste, enivré par son titre d’ambassadeur ou de consul général, « oublient » et souvent par ignorance du fonctionnement de l’administration, dans les répartitions, des tâches des agents affectés par l’état du Sénégal, mais considérés comme « récalcitrants » par le maître des lieux. Cette « chirurgie » opérée dans la répartition des tâches est, dans la plupart des cas, lubrifiée par une complicité savamment entretenue par leurs homologues « carriéristes » de la portion centrale. Ces complices traînent les pieds dans le traitement des dossiers des soi-disant récalcitrants.


C’est en quoi il est pertinent d’interroger le profil de l’agent en charge de la gestion des ressources humaines ou du chef du personnel. Ces deux postes sont, en général, occupés soit par un chancelier ou par un conseiller. Or, ces deux profils sont loin d’avoir des compétences en GRH. Le seul souci jusque-là constaté de ces deux fonctionnaires est d’arranger comme sur un papier de musique les affectations à l’étranger en fonction de favoritismes indignes. Sans compter que le DRH et le Chef du personnel se font toujours affecter soit à Seoul ou à Tokyo où l’indemnité de logement et le salaire sont particulièrement élevés. L’injustice dans la récompense des agents est flagrante. Mais les préposés aux affectations n’en ont cure.


Voilà pourquoi, le poste technique de DRH doit être attribué à des agents qui en ont la compétence même sils ne sont pas de la corporation. Ensuite, le MAESE devrait s’impliquer dans la répartition des tâches des l’affectation à son poste pour corriger les incohérences éventuelles.


Signé
Un diplomate assimilé….
 
 Dakar, Novembre 2020
Lisez encore

Nouveau commentaire :






AUTRES INFOS

Semaine Nationale de la Santé de la Mère et de l'Enfant à Velingara : Sensibilisation communautaire pour des soins maternels et néonatals de qualité

Thomas Tuchel : « Comment expliquer les retours du Real Madrid ?

Ligue des champions : Victoire décisive du Real Madrid contre le FC Bayern Munich

La fête de Tabaski finalement fixée le...

Fin de parcours en Ligue des Champions : Le PSG battu par Dortmund, direction la finale pour les Allemands

Clap de fin sur l'affaire du trafic de drogue : Bachir Diop Libéré

Décès de Marie-Dominique Kacou : Une perte pour le paysage médiatique ivoirien

La Revue de Presse de Fatou Thiam Ngom du 07 mai 2024 (wolof)

DIBA-DADDé : Son nouveau single secoue l'industrie musicale

La Une du journal le réveil du Lundi 06 Mai 2024


Flux RSS

Inscription à la newsletter