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Abdoul Aziz Tall, sur le dialogue politique «éviter une grand-messe sans lendemain»

Dimanche 19 Novembre 2017

Abdoul Aziz Tall sonne l’alerte. A 72 heures de l’ouverture des débats sur le dialogue politique initié par le Chef de l’Etat, Macky Sall, l’ancien ministre chargé du suivi du PSE, non moins conseiller en organisation, tire la sonnette d’alarme afin que ce dialogue soit «sincère et surtout inclusif». Parce qu’avertit-il, «si ces conditions ne sont pas remplies, nous risquons d’assister à une grand-messe, évidemment, sans lendemain». Dans cette interview accordée à Sud Quotidien, l’ancien directeur général de la LONASE remonte le temps en rappelant les nécessités d’un dialogue pour une paix sociale dans notre pays de Senghor à Wade, en passant par Abdou Diouf. A cet effet, il alerte aussi bien les tenants du pouvoir, notamment le Chef de l’Etat, à éviter de se retrouver dans des «postures ambiguës» que les leaders de l’opposition, à ne pas faire de la libération de Khalifa Ababacar Sall une condition sine qua non pour prendre part aux concertations. 
 
Monsieur le ministre, à la veille du démarrage des concertations entre le pouvoir et l’opposition  sénégalaise, quelle opinion faites-vous des rapports de forces en présence ? 
 
Je pense d’abord que lorsqu’on s’achemine vers un événement aussi important que les concertations nationales, nous devons plutôt  user de vocables positifs. Aussi, voudrais-je  vous suggérer d’user du terme «acteurs» en lieu et place de «forces» qui nous renvoie à une logique de confrontation, alors nous allons vers des concertations. Cela dit, il faut noter que le Sénégal en tant que Nation, s’est toujours inscrit historiquement dans une tradition de dialogue et de concertation.

En exerçant le pouvoir, Abdou Diouf s’était plusieurs fois heurté à une farouche opposition de Maître Abdoulaye Wade qui le considérait quelque part comme illégitime, au regard des conditions dans lesquelles  Senghor l’avait choisi pour lui succéder. Il s’en est suivi des moments épiques de confrontation, dont les solutions finissaient toujours par être trouvées, et dans bien des cas avec le concours de chefs religieux crédibles et respectés comme mon homonyme El hadj Abdoul Aziz Sy «Dabaakh», Serigne Abdoul Ahad Mbacké et tant d’autres.        
   
Abdou Diouf, dans de telles circonstances faisait preuve de souplesse et d’humilité, quand bien même il devait s’opposer  à l’aile dure de son parti qui était toujours prête à en découdre avec Wade et ses alliés, notamment ceux de la gauche. Quelle que puisse être l’intensité des hostilités, on finissait toujours  par trouver des solutions qui mettaient notre pays à l’abri des soubresauts connus ailleurs dans le continent, et dont beaucoup sont à l’origine de changements de régime violents. C’est dans cette démarche de concertation qu’à plusieurs reprises, le Président Wade et ses alliés d’alors se sont retrouvés dans des gouvernements de Abdou Diouf.


 
Wade a-t-il perpétué cette tradition ?
 
Arrivé au pouvoir, Abdoulaye Wade qu’une réputation d’homme violent avait précédé, s’était empressé de vouloir effacer cette image en  embouchant  la trompette du dialogue et de la  concertation. Même s’il n’a pas réussi avec autant de bonheur que ses prédécesseurs, il s’était toujours  autoproclamé champion des appels au dialogue avec une comptabilité au nombre de fois qu’il les avait lancés sans succès. Certains de ses poches collaborateurs en avaient fait du reste leur fonds de commerce et le socle de leur stratégie de communication. Toujours est il que s’il avait suivi la même logique de concertation, probablement qu’il aurait pu faire l’économie de la manifestation du 23 juin 2011 et celles qui l’ont précédée et qui ont conduit à sa perte du pouvoir.
 
Pensez-vous que le Président Sall pourrait faire autant, voire mieux que ses prédécesseurs ?
 
Lorsqu’on détient les reines du pouvoir, la tendance naturelle est de vouloir en user de manière absolue. Chez nous africains, cela découle de la conception même  que beaucoup se font de l’autorité. Un chef ne doit souffrir d’aucune contestation. Il décide et l’on exécute. S’y ajoute que la constitution de notre pays renforce cette idée, en faisant du chef de l’état, comme disait l’autre «un monarque républicain.» Il est la clef de voûte de l’ensemble des  institutions et c’est à lui de nommer aux fonctions civiles et militaires. En quelque sorte il est le distributeur des prébendes de la République.  Dès lors qu’on dispose de tous ces pouvoirs, il faut s’imprégner d’une forte dose d’humilité pour se rendre à l’évidence que l’Etat ne se résume pas à sa personne. De ce point de vue, je pense que la démarche du Président Macky Sall est salutaire, parce qu’Il aura fait preuve d’une grande  humilité pour se rendre à l’évidence que l’Etat ne se résume effectivement  pas à sa personne.
 
Pensez-vous que cette concertation a des chances de réussite ?
 
La réussite de l’exercice qui va démarrer ne dépend pas exclusivement du pouvoir et de ses alliés. Tous les acteurs doivent y contribuer avec un esprit patriotique et républicain. Il faut que ce dialogue soit donc sincère et surtout inclusif. Si ces conditions ne sont pas remplies, nous risquons d’assister à une grand-messe, évidemment sans lendemain. Il ne faudrait pas non plus que l’activisme débordant des partis politiques  sans envergure, vienne polluer le vrai sens de cet évènement. Nombre d’entre eux sont  plutôt soucieux, par simple opportunisme, de se faire remarquer, et de par leur sonorité, d’apporter les gages de leur allégeance au pouvoir en place.
 
Comment pourrait-on en apprécier les résultats ?
 
Comme dans toute entreprise qu’on engage,  il est impératif de définir des termes de référence et dégager les indicateurs de résultats auxquels on veut aboutir. Cependant, Il reste entendu qu’on ne  saurait consigner dans ces termes de références, tout ce qui touche le fonctionnement de notre pays. Les concertations ne sauraient être considérées comme une relecture ou réécriture  de notre constitution. Vouloir les considérer comme telle, est d’avance  une manifestation évidente  d’une volonté de les voir échouées.
 
Certains partis politiques ont déjà annoncé qu’ils ne participeraient pas à ces concertations alors que d’autres ont donné leur aval. Qu’est que ce cela vous inspire par rapport au succès attendu de ces concertations ?
 
A mon avis, on ne devrait pas rejeter l’idée d’une participation sans au préalable connaître les termes de référence des concertations. On ne peut pas poser une problématique et vouloir lui trouver des solutions en dehors du cadre de discussions. Il ne faut tout de même pas perdre de vue, que c’est le Président de la République lui-même qui a initié la concertation et que c’est lui qui l’organise par le canal de son ministre de l’intérieur. A ce niveau il faut surtout éviter le piège de l’orgueil mal placé.
 
Justement pour les partisans du refus, la libération du Maire de Dakar doit être effective avant qu’ils n’acceptent de prendre part à la rencontre. D’abord quelle appréciation faites-vous de ce dossier ?
 
Lorsque la justice se saisit d’un dossier, il est un devoir pour tout citoyen justiciable de se garder de porter des jugements, voire de spéculer sur l’issue  qui lui sera réservée. Cela relève même d’une question d’honnêteté intellectuelle, que de ne pas spéculer sur un dossier de justice  dont on ignore assurément tous les contours. Cela dit, dans un dossier de la nature de celui du Maire de Dakar, on peut comprendre, au regard du contexte, que ses partisans  puissent s’aménager des espaces où l’on peut légitimement  s’interroger quant  à  la manière dont il est traité. De ce point de vue, le niveau d’analyse devrait être porté à  mon avis, non pas sur le champ judiciaire, mais plutôt sous l’angle  de l’équité dans le traitement des dossiers introduits par le parquet  au niveau de nos différentes  juridictions.
 
C’est quoi la différence ?

L’équité désigne une forme d’égalité ou de juste traitement. Elle appelle des notions de justice naturelle et d’éthique dans l’appréciation par tous et chacun de ce qui est dû à chacun. La notion d’équité appelle celles d’impartialité et de justice.
 
Vous parlez en connaissance de cause ?
 
Tout à fait ! Pour avoir été moi-même victime d’un manque criard d’équité dans le traitement des dossiers d’audit issus de la première alternance, je  comprends que les partisans du Maire s’offusquent à l’idée qu’il y’a  présomption d’une absence  d’équité dans le traitement de ce dossier.
Avec Sud Quotidien
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