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Criminalisation de l'homosexualité et risque de sanctions internationales : Macky au cœur du dilemme LGBT

Mercredi 29 Décembre 2021

L a bataille entre les députés de la majorité et les membres du le Collectif And Samm Jikko Yi, fondé notamment par l’ONG islamique Jamra concernant l’adoption du projet de loi criminalisant l’homosexualité ne semble qu’etre à ses debuts. Ce débat constitue pour le pouvoir un véritable dilemme dans la mesure où le régime de Macky Sall doit ménager ses partenaires internationaux soutiens des groupes LGBTQ et son opinion publique opposée à ces groupes.

Le chef d’Etat Macky Sall est dans la tourmente en cette fin d’année. En plus des nombreux scandales financiers qui se multi- plient dans les entreprises parapubliques (Lonase, Poste, et dans l’administration publique (Trésor Public), le Président Macky Sall doit affronter une autre tempête beaucoup plus dévastatrice. En effet, le Collectif And Samm Jikko Yi, fondé notamment par l’ONG islamique Jamra a déposé un projet de loi criminalisant l’homosexualité. Une proposition de loi dont l’objectif est de durcir les peines punissant l’homosexualité au Sénégal. Si l’initiative bénéficie d’un soutien dans une partie de l’opinion publique, elle in- quiète la communauté LGBT ainsi que le gouvernement sénégalais qui craint de possibles ré- percussions sur le plan international.


Néanmoins, cette volonté de durcir la loi contre les LGBTQ se heurte à l’hostilité des députés de la majorité. Les députés de la majorité ont rejeté la pro- position de loi arguant du fait que « les éléments de la proposition de loi pour la criminalisation de l’homosexualité sont déjà pris en charge dans notre corpus juridique », a-t-il révélé dans un communiqué publié ce samedi 25 décembre. Selon lui, la « législation du Sénégal qui date de 1966 donc depuis 65 ans est claire et nette à ce sujet, il n’est point be- soin d’y ajouter ou d’en retirer une virgule », le président du groupe parlementaire BBY, Aymerou Gningue samedi dernier.


Des propos qui font échos à celles du député Djibril War qui n’a pas hésité à cogner sur les membres du collectif And Samm Jikko Yi. ‘’J’ai entendu certains menacer les députés qui ne voteront pas cette loi(surla criminalisation de l’homosexualité) de les mettre en mal avec les Sénégalais et les marabouts. Ils sont en train de faire germer la perversion dans le mental des Sénégalais. Nous n’avons pas ce temps. On est là pour gérer la préoccupation des Sénégalais. Faites-nous l’économie de ces lois. Nous avons à gérer les infractions contre les personnes, contre les familles, les mœurs », avait fait savoir le responsable Apériste devant l’hémicycle, le 21 décembre dernier.

l’Ong jamra en première ligne pour l’adoption de la loi
De son côté le vice-président de l’ONG Jamra, Mame Mactar Guèye, un des initiateurs du texte ne compte passe laisser abattre.Il s’est dit engagé dans la lutte afin d’obtenir gain de cause. « Nous allons refaire le tour des 45 dé- partements. Certainement, dans les heures qui suivent le directeur de la plateformeAnd Samm Jikko Yi, va convoquer une réunion d’urgence. Nous n’excluons pas d’aller revoir les mêmes khalifes généraux qui avaient signé pour cautionner la proposition de loi et leur dire que ce groupe parlementaire a dit qu’il n’est pas d’accord », a-t-il fait savoir. La bataille est lancée entre le pouvoir et une partie de l’opposition. Les promoteurs de cette loi entendent poursuivre le combat afin de renforcer la lutte contre l’homo- sexualité. Les promoteurs de la loi ne comptent pas baisser les bras.Ainsi des marches, et des pétitions contre l’homosexualité ne sont pas à exclure dans les pro- chaines semaines pour mettre la pression sur la majorité et l’incité à voter ce texte de loi.

En effet, l’article 319 du Code pénal punit d’un à cinq ans d’emprisonne- ment toute personne qui aura commis un « acte contre-nature avec un individu de son sexe ». Mais les treize députés qui portent la nouvelle proposition de loi veulent aller plus loin. « L’objectif est de lutter contre toute perversion dans l’espace public. Ces per- sonnes doivent respecter la société dans laquelle elles vivent et faire ce qu’elles veulent en privé. La liberté a ses limites », explique le député Moustapha Guirassy, qui a participé à l’écriture du texte.


La proposition de loi propose que toute personne qui aura été reconnue coupable de « lesbianisme, homosexualité, bisexualité, transsexualité, intersexualité, zoophilie, nécrophilie et autres pratiques assimilées » soit punie d’une peine de cinq à dix ans de prison ferme et d’une amende de 1 à 5 millions de francs CFA (de 1 524 à 7 622 euros). Selon ses promoteurs, le renforcement des sanctions pénales rendra la nouvelle loi dissuasive. « L’article 319 ne mentionne pas et ne définit pas clairement l’homosexualité, donc cela ouvre une brèche pour l’impunité des personnes accusées », explique Mame Moctar Gueye de Jamra.

Le régime de Macky Sall fait le dos rond

Mais du côté du Palais et du gouvernement c’est le silence radio. L’Etat du Sénégal est entre le marteau et l’enclume. Si à plu- sieurs reprises, il s’est prononcé contre la dépénalisation de l’ho- mosexualité notamment lors de la visite du President américaine (Obama) et du Premier ministre canadien (Trudeau),sa posture est jugée par les spécialistes très délicates dans la mesure où notre paysjouit d’une bonne image au- près des grandes instances inter- nationales onusiennes. En outre, la ministre des affaires étrangères, AissataTall Sall, a rap- pelé la position de l’État du Séné- gal devant les députés, le 21 décembre, à l’Assemblée nationale. « Le Sénégal n’acceptera jamais l’homosexualité. Personne ne pourra nous l’imposer », a-t- elle déclaré, balayant d’un revers de main les pressions internationales en faveur de la dépénalisation.

Cette loi risque de voir le Sénégal classé sur la liste rouge des destinations à risque pour la communauté LGBTQ. En outre, le gouvernement redoute de possibles boycotts de notre pays par des différents programmes inter- nationaux d’appui au développe- ment tels que Oxfam, Pnud. Une opinion que partage le journaliste Cheikh Yerim Seck qui se dit in- quiet des conséquences économiques et diplomatiques du vote de cette loi. « Le Sénégal sera inscrit sur la liste rouge. Les relations entre le Sénégal et certains pays ou organismes internationaux risquent d’en pâtir, au regard des accords et traités signés.

Le Sénégal sera inscrit sur la liste rouge et cela se traduira par une dégringolade de notre pays sur tous les tableaux de classement des États, en termes de bonne gouvernance et de bonne conduite », averti-t-il dans la presse avant d’indiquer que « notre pays risque une sorte de boycott économique du Sénégal », a -t-il ajouté.

Les enjeux politiques de cette loi

Avec cette loi, le gouvernement de Macky Sall marche sur les œufs. Il doit composer avec une opinion publique échaudée parles actes homosexuels et les partenaires occidentaux qui depuis plu- sieurs années promeut les droits de la communauté LGBT. Sentant le piège. L’enjeu du régime de Macky Sall est de pouvoir se dé- gager de cette affaire sans beau- coup trop de dommages, a indiqué Moussa Diaw, analyste politique qui indique au passage qu’il sera très difficile pour l’Etat de se défaire de ce piège tendu par une partie de l’opposition.« Cette question est un peu délicate et sensible.Il y a des enjeux internes et externes.


Sur le plan international, il y a plusieurs lobbies qui mi- litent pour le respect des droits pour les LGBTQ. Ils ont une grande capacité de nuisance et peuvent intervenir pour bloquer des financements et ternir l’image du pays. Ces groupes peuvent ainsi déclarer que notre démocratie est biaisée et que le Sénégal est un pays intolérant. Amon avis, le gouvernement risque de se ranger à la position des députés de la majorité qui indiquent que cette question est déjà prise en charge parla loi et qu’il n’est pas opportun de légiférer. Par ailleurs, le gouvernement veut éviter que cette question puisse devenir un enjeu électoral pour le prochain scrutin local », déclare-t-il avant de préciser que cette question explosive est susceptible de mettre en mal le gouvernement avec les populations locales et les chefs religieux.


« La majorité ne veut pas abor- der cette question. Donc ils’agira pourl’Etat de faire le dosrond. Le gouvernement va jouerla carte de la montre et attendre que de nou- velles questions politiquesliées au scrutin local, nomination du nou- veau Premier ministre viennent chasser cette affaire de l’espace public. Toutefois, l’opposition peut profiter de cette situation pour trouver un nouvel angle d’attaque contre l’Etat. Elle peut relancer la loi et ainsi tenter de mettre en mal le gouvernement et les populations très hostiles à l’homosexualité. C’est une ba- taille politique qui va se faire entre l’opposition et le pouvoir », affirme l’universitaire.

Par Samba Diop
Hebdomadaire L'Indépendant
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