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Macky Sall plus Biya que Gbagbo

Lundi 5 Novembre 2018

Ceux qui s’interrogent encore sur le patriotisme de Macky Sall, s’étonnant des nombreux marchés qu’il accorde aux étrangers, n’ont qu’à regarder du côté du Cameroun ou alors de la Côte d’ivoire. La préférence nationale, une politique inconnue par les tenants du pouvoir, n’est pas mise à rude épreuve juste pour contenter la France. Entre la place de Paul Biya et celle de Laurent Gbagbo, Macky a fait son choix et déroule sa politique.

Ce mois d’octobre aura révélé le véritable visage du président qui dirige le Sénégal. Entre son déplacement à Touba et sa visite en Allemagne, Macky Sall s’est laissé observer à l’état brut. Son fameux discours, lors de son face-à-face avec le khalife général des mourides, c’est dans un coin qu’il l’aurait griffonné avant de le lire avec un manque d’assurance et de sérénité aussi invraisemblable qu’indigne d’un chef d’Etat. Après avoir escamoté les Khassaides de Serigne Touba et indiqué que c’est le retour d’exil de ce dernier qui est commémoré, il ne pouvait qu’enrager après les réseaux sociaux où il est la risée des internautes qui le tournent profusément en dérision. Comme à Touba, en Allemagne aussi, c’est un Macky Sall, très éloigné du protocole, qui prend la parole. En acceptant de répondre aux questions d’un journaliste, sans se préparer à l’avance, il a davantage renseigné sur les convictions d’un homme hors de son époque.

« Ce sont des accusations ridicules ! Parce que non seulement depuis 1996, on a fait la réforme du secteur de l’eau et nous avions déjà, je n’étais pas encore Président, mais le gouvernement d’alors avait absolument fait un appel d’offres international. C’est une société privée internationale qui avait gagné mais depuis lors, malgré la participation de Sénégalais dans le capital, ils sont dans le capital, pourquoi n’ont-ils pas pu prendre part ? C’était un appel d’offres ouvert ! On n’a pas dit que c’était pour les étrangers ! Donc aujourd’hui il est facile de se cacher derrière ce genre de revendications. Mais c’est par le travail que les gens doivent pouvoir, je pense, après vingt ans de compagnonnage, on aurait pu avoir des gens capables aujourd’hui de présenter une offre qui soit acceptée, mais dire qu’on donne tout à l’étranger c’est un argument trop facile. Cela dit, nous ne pouvons pas vivre en autarcie… ». C’est la réponse du Président SALL interpellé sur le secteur de l’eau qui vient d’être adjugé au groupe français Suez. Non seulement il se défausse sur les régimes précédents dont il a d’ailleurs recyclé de nombreux caciques, mais il accable les Sénégalais incapables, selon lui, de faire face à la concurrence des étrangers. Pourtant, quand Kabirou MBODJI a tenté de racheter Tigo, de nombreux bâtons lui ont été mis dans les roues. L’investisseur français Xavier Niel s’est appuyé sur des Sénégalais pour lui damer le pion. Si la préférence nationale compte pour du beurre, le patriotisme passé par pertes et profits, les nationaux n’ont pas beaucoup de chance face à des multinationales étrangères fortement appuyées par leurs Etats. L’ambassadeur Christophe Bigot n’a-t-il pas réagi en faveur d’Auchan acculé par les commerçants sénégalais ? Les appels d’offres internationaux, c’est de la fumisterie. Un piège de la mondialisation. C’est si terre à terre et Macky SALL le comprend bien. Sa propension a livré les secteurs les plus sensibles et plus rentables de l’économie sénégalaise à des étrangers ne s’explique pas par l’incapacité de ses concitoyens. Auchan ne s’est pas implanté au Sénégal parce que les Sénégalais ne savent pas vendre.

Pourquoi pendant que Laurent Gbagbo est en prison, Blaise Compaoré se la coule douce entre Abidjan et Yamoussoukro ? Pourquoi Paul Biya, Faure Gnassingbé, Idriss Déby, Sasou Nguesso ont réussi là où Yahya Jammeh a échoué ?  A ces questions, le président Sall a trouvé sa réponse et sa politique. Sa grande générosité envers la France, c’est ce qui a manqué à Laurent Gbagbo mais fait la force de Paul Biya. Après avoir rendu dépendant de nombreuses entreprises françaises à sa présidence, qui leur accorde de généreuses faveurs, le Camerounais n’a eu aucune peine à 85 ans à briguer pour une septième fois le suffrage de ses compatriotes entre le marteau de la police et l’enclume de la pauvreté. En juin 1990, quand le président Mitterrand, lors de la 16e conférence des chefs d’État d’Afrique et de France, exigeait des chef d’Etat africains francophones plus d’ouverture démocratique, c’était pour conforter ceux-là qui servaient les intérêts de la France. Au Togo et au Gabon, des fils ont remplacé leurs pères. Et Gbagbo, qui a tenté de battre sa propre monnaie, s’est retrouvé à la Cour pénale internationale. Interviewé, dernièrement, par RFI, TV5 Monde et le journal Le Monde, le président tchadien, Idriss Deby, a lâché : « c’est la France qui m’a forcé la main pour rester au pouvoir ».

Pour Macky Sall, qui s’est dépêché d’aller en visite en France au lendemain de son élection à la tête de l’Etat, ce ne sont pas les 1 million 700 mille et quelques Sénégalais qui lui ont accordé plus de 65% des suffrages qui vont le maintenir au pouvoir. Une logique qui conditionne sa gestion du pouvoir qui réduit les Sénégalais à la sous-traitance. Cette tendance, conjuguée aux nombreuses forfaitures dont il s’est rendu coupable, (reniement de sa parole, nomination d’Aliou Sall qui a fait bénéficier à Frank Timis un contrat pétrolier, accueil bienheureux des transhumants…), a fini par lui coller une impopularité qui ne peut lui permettre de rempiler sans faire forcing. Et c’est là que le scénario qu’étale Pape Diop prend tout son sens. Des résultats préfabriqués, comme savait si bien le faire un certain Blaise Compaoré. La France a certes pu lui éviter la prison, mais elle n’a pas réussi à le maintenir au pouvoir quand les Burkinabé en ont eu ras-le-bol.
Par Mame Birame Wathie
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