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Ansou Sané, DG de l’ANRAC : « j’ai décidé de mettre l’accent sur la réinsertion, réintégration économique des déplacés et réfugiés de retour dans leur terroir… »

Dimanche 22 Juillet 2018

Le nouveau directeur général de l'Agence nationale pour la relance des activités économiques et sociales de la Casamance (ANRAC), Ansou San, a accordé un entretien exclusif à nos confrères de l'Observateur. Dans cet interview, il trace sa feuille de route pour la relance des activités économiques et sociales en Casamance.

Il y a presque un an, jour pour jour, que vous avez hérité de l’ANRAC en remplacement de Madame Aminata Angélique Manga. Dans quel état l’avez-vous trouvée ? 

Je voudrais tout d’abord remercier le Chef de l’Etat, Macky SALL, pour la confiance qu’il a encore renouvelée sur ma modeste en me nommant au poste de Directeur général de l’ANRAC. L’ANRAC, comme vous le savez, est un instrument mis en place par l’Etat, depuis 2004, pour accompagner le processus de paix issu des accords de paix signés entre le Gouvernement et le MFDC. Grace au Programme de Relance des Activités économiques et sociales qu’elle a déroulée de 2005 à 2010, elle  a joué un rôle important dans l’accompagnement de ce processus.

A la fin de ce programme, l’Agence avait engagé différentes phases pour la réactualisation de ses outils de planification stratégique qui, malheureusement, n’avaient pas connu d’issue. Cette situation a plongé l’Agence dans  des  difficultés qui l’ont empêché de remplir sa vocation. Il s’agit de problèmes liés à la faiblesse des ressources financières. A cela, se sont ajoutés des difficultés liées   au management de l’ANRAC. Aujourd’hui, nous travaillons à aplanir ces difficultés et le travail a été beaucoup facilité par le soutien que l’on a eu au plus haut niveau de l’Etat. Et cela est visible notamment par le rattachement institutionnel de l’ANRAC au Secrétariat général de la Présidence de la République, le choix porté sur nous  pour faire partie des trente (30) agences et établissements publics devant signer un contrat de performance avec l’Etat du Sénégal après l’élaboration d’un Plan stratégique de Développement.
 
 
Avez-vous fait l’inventaire des actions entreprises par l’Agence pour la relance des activités de la Casamance ? 
L’ANRAC a joué et continue à jouer un rôle extrêmement important dans l’accompagnement du processus de paix. Et pour cerner l’impact des actions menées, il faut revenir aux missions qui lui sont confiées. En effet, il ya une mission au plan stratégique consistant pour l’Agence à  planifier, à coordonner et à harmoniser les interventions des acteurs en Casamance.
 
 Pour cette mission, force est de reconnaitre que l’Agence avait  eu du mal à la mettre en œuvre du fait entre autres, de la pluralité des acteurs qui interviennent dans ce domaine et la multitude d’ONG avec chacune son plan d’action, ses logiques d’intervention… Ensuite, au plan opérationnel, l’ANRAC est chargée d’assurer la réintégration sociale et économique des combattants et de leurs familles et celles des autres réfugiés et personnes déplacées, d’assurer la reconstruction ou réhabilitation des infrastructures sociales et économiques.

 A ce niveau, l’ANRAC, avec ses composantes PARC, PADERCA, PROCAS a réalisé beaucoup d’investissements en termes de construction , de réhabilitation d’écoles, de postes de santé, de murs de clôtures d’établissement, de blocs maraichers, de construction de pistes de production. Il s’y ajoute l’aide au retour des populations déplacées avec les programmes de réhabilitation des habitats sociaux et l’appui de toutes activités sportives, cultuelles et culturelles susceptibles de consolider la paix, la réconciliation des communautés.
 
Quels sont les axes principaux de vos actions ? 
A examiner de prés  les interventions sur le terrain, l’on constate  que pendant longtemps, l’aspect DDR a beaucoup rejaillit dans les missions surtout au plan opérationnel. Cela se comprenait aussi eu égard au contexte de l’époque. Aujourd’hui, depuis l’avènement du Président Macky SALL, l’on a noté une accalmie qui a rendu favorable la libre circulation des personnes et des biens, la relance des activités. Le Chef de l’Etat a aussi et surtout changé de paradigme dans la gestion du processus de paix en passant de la logique désarmement, démobilisation et réinsertion au tryptique reconstruction, réconciliation et développement durable. C’est tout le sens des investissements structurants réalisés par le Gouvernement en Casamance et des programmes importants que le Président de la République y a déployé. Dans ce contexte, il est important que l’ANRAC adapte aussi ses interventions  à cette nouvelle dynamique. C’est pourquoi, j’ai décidé de mettre l’accent sur la réinsertion réintégration économique des déplacés et réfugiés de retour dans leur terroir à la faveur de ce retour de la paix. Je reviens d’une tournée à l’issue de laquelle des Comités locaux de Développement ont été organisés à Sindian et à Djibanar pour exécuter, dans une phase pilote, des activités génératrices de revenus au profit des personnes impactées. Il s’agit d’une activité importante que l’on entend dérouler pour faciliter le retour et la réinsertion de ces personnes.

L’objectif est d’y aller dans le cadre du fair fair en impliquant des services techniques et des agences partenaires telles que l’ANCAR dans la mise en œuvre des projets. J’en profite d’ailleurs pour remercier sincèrement les Sous Préfets de ces localités pour leur disponibilité à nous accompagner dans cette initiative.  
 
Quels sont les chantiers en cours ou futuristes qui sont dans votre plan d’actions ?
Il ya un chantier important qu’on a bouclé, c’est celui de la restructuration de l’Agence. En effet, une des difficultés internes qu’a connu l’ANRAC  a été la non maitrise de ses charges de fonctionnement notamment de la masse salariale. Cette situation a fait que, pendant longtemps, toutes les ressources allouées  ont servi à prendre en charge des salaires empêchant  ainsi la structure à remplir ses missions. Avec le sens de la compréhension des agents, leur accompagnement et le soutien du Conseil de Surveillance, j’ai pu opérer une restructuration  qui nous a permis, aujourd’hui, de baisser notre masse salariale, de disposer d’une grille salariale formelle.
Du point de vue stratégique, nous avons bouclé le processus d’élaboration de notre Plan stratégique de Développement ainsi que la réactualisation du décret portant organisation et fonctionnement de l’ANRAC.
 
En effet, l’ANRAC continue à être organisée par le décret de 2004 qui est en porte à faux avec les dispositions de la loi de 2009 sur les agences et qui est en contradiction avec la nouvelle vision du Président de la République s’agissant du développement de la Casamance. Aujourd’hui, dans la nouvelle mouture, nous avons voulu donner à l’Agence les moyens de jouer véritablement un rôle dans l’émergence d’une Casamance développée.
 
Nous essayons aussi de redynamiser le partenariat pour accompagner toutes les structures intervenant dans la reconstruction de la Casamance. Par ces outils, nous entendons mettre à leur disposition notre légitimité, notre connaissance de la Casamance et notre acceptation par les populations pour faciliter la réussite de leurs missions. Nous le faisons par le biais de la mobilisation sociale et de la médiation si cela s’avère nécessaire.
 
Il ya aussi un chantier important que j’ai engagé, sur instructions de notre tutelle, c’est celui de la délocalisation de l’ANRAC en Casamance pour être plus proche de notre cible et faire des économies pouvant être injectées dans nos activités. Il est important pour l’autorité que l’ANRAC soit délocalisée et nous travaillons à matérialiser cette instruction. Déjà, l’Agence du Patrimoine Bati de l’Etat, dont je remercie, au passage, le  Directeur général, mon ami Monsieur Abdou Karim FOFANA, nous a affecté des locaux à usage de bureaux et est en train de prendre toutes les dispositions pour leur réhabilitation. Nous pensons que d’ici très bientôt, nous pourrons nous déployer sur le terrain pour plus d’efficacité de nos missions.
Enfin, il ya aussi la nécessité, dans notre déploiement en Casamance, de veiller à un maillage correct et de résorber notre déficit d’intervention dans les régions de Sédhiou et de Kolda. C’est le sens du choix de Djibanar, une commune du département de Goudomp, région de Sédhiou,   pour abriter des activités de réinsertion économique puisque c’est aussi une zone extrêmement impactée par le conflit avec 29 villages de déplacés dont 3 seulement sont effectivement retournés.
 
 
 Quel bilan pouvez-vous tirer dans le cadre de la relance des activités en Casamance ?
Le gouvernement accorde une place fondamentale au développement de la Casamance. Aujourd’hui, c’est par le biais du développement économique qu’on parviendra à consolider cette accalmie notée depuis l’avènement du Président Macky SALL et aller résolument, comme on le fait, vers un retour définitif de la paix.  C’est pourquoi, à l’occasion des Conseils des ministres décentralisés, le Gouvernement a consacré des volumes d’investissement importants pour la Casamance. Ainsi, à titre d’exemple, la région de Ziguinchor a bénéficié de promesses d’engagement de l’ordre de 360.820.000 FCFA avec des taux d’exécution qui ont dépassé les 75%, quant à la région de Kolda, les engagements sont de 204.519.000 FCFA avec un taux de réalisation de l’ordre de plus de 80%. En plus de ces engagements, plusieurs programmes et projets interviennent dans les régions de la Casamance pour assurer la relance. L’ensemble de ces efforts ont contribué  à faciliter la reprise de l’activité touristique avec la loi faisant de la Casamance zone touristique nationale d’intérêt spécial, à impulser  la mécanisation et la modernisation du secteur agricole avec l’intervention des projets comme le PPDC, le P2RS, le projet USAID/Naatal Mbaay et le PNAR , à promouvoir   l’auto-emploi surtout chez les jeunes et les femmes  et à améliorer les conditions d’accès à l’éducation et à la formation grâce aux projets d’infrastructures du Ministère de l’Education et du Ministère de l’enseignement supérieur.

Le désenclavement de la Casamance constitue également une autre priorité de l’Etat avec la construction du pont de farafégné qui sera bientôt bouclée, la construction de la RN6, le dragage du fleuve Casamance avec son impact dans la valorisation du Port de Ziguinchor, la réalisation par PROMOVILLES de plusieurs chantiers à l’intérieur des agglomérations des capitales régionales , l’acquisition de deux bateaux à coté de celui réservé au fret et le projet de construction d’un agropole à Adéane avec , en perspective, la création de prés de 9000 emplois. Au plan aérien, il existe deux compagnies qui assurent la désserte quotidienne avec au mois quatre vols journaliers.
Aujourd’hui, il ya une réelle volonté   et des efforts considérables sont  consentis pour résorber le retard accusé par la Casamance dans le développement et asseoir les conditions pour permettre à cette région de jouer sa partition dans la construction d’un Sénégal émergent. Bien sur, nous continuerons à faire le pladoyer auprès du Chef de l’Etat pour qu’il  accorde davantage une discrimination positive à notre région puisque aucun investissement ne suffit et ne suffira pour la Casamance compte tenu de ses potentialités et du retard qu’il a accusé du fait du conflit armé.
 
L’Anrac a connu, au cours de ces dernières années, une baisse drastique de son budget. Est-ce que le budget actuel de moins de 600 millions F CFA vous permet-il de réaliser vos projets ? 
Comme vous le savez, pendant longtemps, le PRAESC, qui était le principal programme de référence de l’ANRAC a cristallisé la contribution  et le concours de plusieurs partenaires techniques financiers qui avaient accepté d’accompagner l’Etat dans la reconstruction de la Casamance. Ces différents concours ont permis de mobiliser d’importantes ressources et pouvoir ainsi financer les composantes du PRAESC que sont le PARC, le PADERCA et le PROCAS. Depuis la fin de ce programme, l’ANRAC ne fonctionne que grâce aux ressources issues du BCI. En outre, force est de reconnaitre que des problèmes de gestion, de management et de planification des ressources humaines avaient, pendant longtemps, empêché la structure d’atteindre les performances attendues d’elle. C’est pourquoi, l’un des premiers chantiers que j’ai engagé a été celui de la restructuration pour mieux maitriser les charges de fonctionnement et faire en sorte que, contrairement aux années précédentes, les ressources allouées aux investissements soient utilisées exclusivement à cette fin pour mieux prendre en charge les préoccupations légitimes des populations impactées par le conflit. Ensuite, pour une structure donnée,  les budgets importants sont adossés à un document stratégique, un outil de planification et de pilotage bien ficelé, or l’ANRAC, depuis le PRAES, n’en avait pas. Ce n’est que cette année que je viens de boucler, sur instructions de la tutelle, le processus d’élaboration de notre Plan stratégique de Développement. Maintenant, il est heureux de dire que les perspectives d’évolution de notre budget sont très favorables pour les trois ans à venir  et nous espérons que l’ANRAC pourra véritablement jouer pleinement sa vocation en Casamance.
 
La création du Projet pôle de développement de la Casamance (Ppdc) ne va-t-elle pas affaiblir l’ANRAC quand on sait qu’il joue le même rôle ?
Cette question a été beaucoup agitée mais ma conviction est que la Casamance a besoin d’un renforcement des interventions de l’Etat, sous différentes formes et avec plusieurs leviers d’actions, pour résorber son gap de développement. Et ce que le Président de la République a compris en déployant en Casamance tous les projets et programmes. Pour la Casamance, cela constitue des opportunités réelles pouvant contribuer à relever le niveau des investissements.

C’est pourquoi, dans cet environnement, l’ANRAC  a une mission, un devoir impérieux d’accompagner tous les acteurs engagés dans la reconstruction de la Casamance. Et c’est la raison pour laquelle, j’ai mis l’accent sur la collaboration entre acteurs pour nouer des complémentarités dans les actions mais surtout faire profiter à ces structures notre légitimité, notre connaissance des réalités du terrain, notre maillage de la Casamance.
 
Avec le PPDC, j’ai signé une convention, depuis que j’occupais déjà  le poste de Secrétaire général, pour mener des actions de communication sociale et de médiation sociale. Cela a beaucoup contribué à l’acceptation de ce programme dans certaines contrées de la Casamance où ses interventions avaient suscité, par moments des résistances, du fait d’incompréhensions de la part  des bénéficiaires. Aujourd’hui, nous intervenons dans toutes les localités où le PPDC réalise des ouvrages pour mettre en place des comités d’engagement citoyen et mieux susciter l’adhésion des collectivités locales dans la gestion de ces ouvrages. Nous en avons installé un à Diegouné (Ziguinchor), un à Diaroumé (Sédhiou) et un troisième à Pakour dans la région de Kolda.
 
Et avec le Coordonnateur, Monsieur Youssouph BADJI, nous avons décidé de monter en puissance dans le partenariat en identifiant d’autres axes de collaboration pour permettre aussi au PPDC  de nous accompagner dans la réalisation de notre mission de réinsertion/réintégration  économique des groupes vulnérabilisés. Je voudrais d’ailleurs le saluer et le remercier pour ce qu’il fait en Casamance.  L’ANRAC avait beaucoup aidé, par la médiation sociale, le projet du MCI  durant la phase de construction de la RN6. Et aujourd’hui, nous avons signé une convention avec le PUMA pour des activités d’ingénierie sociale et pour plus de complémentarité dans nos interventions au  profit des populations frontalières de la Gambie et de la Guinée qui  sont de retour dans leur terroir après des années de déplacement en raison des situations d’insécurité. Nous sommes dans des discussions également  avec le PUDC pour une convention de partenariat.
 
En politique,  vous faites parties des poulains du Président Benoit Sambou, comment vous vivez les tendances en cours au sein de l’APR ?
Comme dans le reste du pays, le parti vit à coté des mouvements de soutien et des tendances. Il faut avouer qu’au départ, il y’avait une  situation conflictuelle qui régnait et qui avait pollué notre discours et nous avait écarté de l’essentiel, c’est à dire  la vulgarisation de l’image et des réalisations du Président de la République à Ziguinchor. C’est ce qui a expliqué par exemple  notre défaite  cuisante lors des locales de 2014.  Mais depuis, autour du Doyen Robert SAGNA et autour du leadership du Président de la CNDT, le Ministre d’Etat Benoit SAMBOU, nous avons su taire nos divergences à chaque fois que les échéances l’exigeaient pour se mettre autour d’un cadre unitaire. Cela nous a permis de remporter, après, toutes les élections (référendum comme législatives). Donc, ces tendances, comme je le soutiens, sont une bonne chose pour le parti si elles apportent une contribution dans la massification du parti et à condition qu’elles ciblent les militants de notre principal adversaire à Ziguinchor, l’UCS et non à faire du débauchage de militants et responsables de l’APR, cela n’apporte rien au parti et ne sert pas le Président de la République. Le Ministre Benoit a toujours prôné le leadership pluriel car il reste convaincu que chacun a sa partition à jouer pour le développement de la Casamance. C’est un homme passionné de la Casamance, sincère et loyal dans ses relations avec les gens et c’est pourquoi, il continue à voir sa légitimité se consolider du fait de sa proximité avec les populations et sa générosité désintéressée.

Personnellement, je suis un militant du parti, dans le parti et je travaille, de façon résolue et engagée, à l’aider dans le travail que le Président de la République, le Président de l’APR lui a confié à Ziguinchor, celui de massifier les rangs de l’APR. Et ce travail, il le fait bien aidé en cela par un Président qui a manifesté un amour, un intérêt profond et réel pour la Casamance.
 
 
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