La nouvelle politique agricole du régime en place semble renouer avec une ambition ancienne : celle de bâtir une agriculture structurée à travers des domaines agricoles d’État ou en partenariat public-privé, à l’image de la vision portée par Mamadou Dia au lendemain des indépendances. L’objectif affiché est clair : assurer la souveraineté alimentaire du pays et offrir des opportunités économiques à une jeunesse en quête d’emploi.
Mais cette vision, aussi ambitieuse soit-elle, mérite d’être questionnée. Peut-on vraiment réussir une révolution agricole en voulant faire de la majorité de nos jeunes des cultivateurs ? L’agriculture sénégalaise a-t-elle besoin de bras, ou plutôt de cerveaux, d’entrepreneurs, de champions ?
Les domaines agricoles, en tant qu’espaces organisés et maîtrisés, ont donné des résultats probants au Brésil, au Vietnam ou au Rwanda. Ces expériences ont permis la mutualisation des ressources, la formation des agriculteurs, la mécanisation, et un accès fluide aux marchés. Toutefois, l’expérience historique du Sénégal montre que ce type de structures peut rapidement devenir des "mammouths" inefficaces, plombés par la bureaucratie, les lenteurs administratives et une gestion publique souvent peu rigoureuse.
Le vrai risque, ici, est de tomber dans un mimétisme institutionnel. Reproduire des modèles étrangers, sans tenir compte des spécificités sociales, économiques et culturelles de notre pays, ce serait une erreur stratégique.
Par ailleurs, bon nombre de nos jeunes n’aspirent pas à devenir cultivateurs au sens traditionnel. Ils veulent entreprendre, innover, se former, parfois dans l’agroalimentaire ou l’agro-industrie, mais rarement dans des conditions de travail agricoles vétustes. Prôner donc le retour massif à la terre peut relever du romantisme idéologique, plus que d’un pragmatisme économique.
L’agriculture moderne n’a pas vocation à être une activité de masse sous-payée. Elle peut, au contraire, devenir une activité technique, technologique et rentable, si elle est portée par des individus bien formés, bien financés et bien accompagnés.
Ce dont le Sénégal a besoin, c’est d’une politique d’identification, de formation et de soutien à des champions agricoles. Des jeunes ou des moins jeunes, prêts à investir dans la production, la transformation, la commercialisation ou l’innovation. Il s’agit de créer une élite entrepreneuriale rurale, capable d’initier des dynamiques locales durables, là où l’État, souvent, fait des contre-performances.
Les expériences passées parlent d’elles-mêmes : la SODAGRI, la SAED ou encore l’ISRA ont connu des hauts et des bas, plombés par la politisation, le clientélisme et une gestion inefficace. À l’inverse, des entreprises privées comme La Rivière, Delta SA, AfricAgri, ou encore les coopératives de la zone des Niayes, affichent des rendements élevés, preuve qu’un autre modèle est possible.
Ces constats nous invitent à repenser le rôle de l’État. À notre humble avis, il serait plus judicieux de consolider les filières déjà performantes, plutôt que de s’aventurer dans des modèles coûteux et incertains.
Plutôt que de financer directement la production, l’État devrait jouer un rôle d’intermédiaire stratégique : connecter les producteurs aux marchés, aux chercheurs et aux investisseurs. Il devrait aussi professionnaliser le métier d’agriculteur, en l’insérant dans une chaîne de valeur moderne et cohérente.
Car la souveraineté alimentaire ne se décrète pas. Elle se construit. Et elle ne passe pas nécessairement par le retour en force de l’État dans la production. Elle exige avant tout une vision stratégique : faire émerger des talents, sécuriser le foncier, moderniser les outils, investir dans la formation, et valoriser l’agriculture comme un secteur d’excellence.
Le temps est venu de passer d’une agriculture de subsistance à une agriculture d’ambition, portée non pas par la lourdeur administrative, mais par des champions, catalyseurs d’une nouvelle ère.
Que Dieu bénisse le Sénégal!
Mamadou Saliou Sow
Professeur de MSP.
Mais cette vision, aussi ambitieuse soit-elle, mérite d’être questionnée. Peut-on vraiment réussir une révolution agricole en voulant faire de la majorité de nos jeunes des cultivateurs ? L’agriculture sénégalaise a-t-elle besoin de bras, ou plutôt de cerveaux, d’entrepreneurs, de champions ?
Les domaines agricoles, en tant qu’espaces organisés et maîtrisés, ont donné des résultats probants au Brésil, au Vietnam ou au Rwanda. Ces expériences ont permis la mutualisation des ressources, la formation des agriculteurs, la mécanisation, et un accès fluide aux marchés. Toutefois, l’expérience historique du Sénégal montre que ce type de structures peut rapidement devenir des "mammouths" inefficaces, plombés par la bureaucratie, les lenteurs administratives et une gestion publique souvent peu rigoureuse.
Le vrai risque, ici, est de tomber dans un mimétisme institutionnel. Reproduire des modèles étrangers, sans tenir compte des spécificités sociales, économiques et culturelles de notre pays, ce serait une erreur stratégique.
Par ailleurs, bon nombre de nos jeunes n’aspirent pas à devenir cultivateurs au sens traditionnel. Ils veulent entreprendre, innover, se former, parfois dans l’agroalimentaire ou l’agro-industrie, mais rarement dans des conditions de travail agricoles vétustes. Prôner donc le retour massif à la terre peut relever du romantisme idéologique, plus que d’un pragmatisme économique.
L’agriculture moderne n’a pas vocation à être une activité de masse sous-payée. Elle peut, au contraire, devenir une activité technique, technologique et rentable, si elle est portée par des individus bien formés, bien financés et bien accompagnés.
Ce dont le Sénégal a besoin, c’est d’une politique d’identification, de formation et de soutien à des champions agricoles. Des jeunes ou des moins jeunes, prêts à investir dans la production, la transformation, la commercialisation ou l’innovation. Il s’agit de créer une élite entrepreneuriale rurale, capable d’initier des dynamiques locales durables, là où l’État, souvent, fait des contre-performances.
Les expériences passées parlent d’elles-mêmes : la SODAGRI, la SAED ou encore l’ISRA ont connu des hauts et des bas, plombés par la politisation, le clientélisme et une gestion inefficace. À l’inverse, des entreprises privées comme La Rivière, Delta SA, AfricAgri, ou encore les coopératives de la zone des Niayes, affichent des rendements élevés, preuve qu’un autre modèle est possible.
Ces constats nous invitent à repenser le rôle de l’État. À notre humble avis, il serait plus judicieux de consolider les filières déjà performantes, plutôt que de s’aventurer dans des modèles coûteux et incertains.
Plutôt que de financer directement la production, l’État devrait jouer un rôle d’intermédiaire stratégique : connecter les producteurs aux marchés, aux chercheurs et aux investisseurs. Il devrait aussi professionnaliser le métier d’agriculteur, en l’insérant dans une chaîne de valeur moderne et cohérente.
Car la souveraineté alimentaire ne se décrète pas. Elle se construit. Et elle ne passe pas nécessairement par le retour en force de l’État dans la production. Elle exige avant tout une vision stratégique : faire émerger des talents, sécuriser le foncier, moderniser les outils, investir dans la formation, et valoriser l’agriculture comme un secteur d’excellence.
Le temps est venu de passer d’une agriculture de subsistance à une agriculture d’ambition, portée non pas par la lourdeur administrative, mais par des champions, catalyseurs d’une nouvelle ère.
Que Dieu bénisse le Sénégal!
Mamadou Saliou Sow
Professeur de MSP.