Ousmane Kane : « Le Premier ministre doit faire attention à ses déclarations »

Vendredi 21 Novembre 2025

Dans ce texte partagé exclusivement avec L’Observateur, le magistrat Ousmane Kane, ancien président de la Cour d’appel de Kaolack, rétablit la vérité face aux accusations du Premier ministre Ousmane Sonko. Dans un contexte politique tendu, l’ancien juge, qui a participé au Premier Conseil supérieur de la magistrature du président Diomaye, revient sur tous les magistrats occupant des postes clés sous l’ancien régime et remplacés par le président Bassirou Diomaye Faye. Il réfute ainsi les attaques publiques dirigées contre la justice et souligne l’importance d’une approche fondée sur la légalité et la rigueur judiciaire. Son intervention éclaire les Sénégalais sur les enjeux de la transformation institutionnelle en cours.

Lors du meeting de Sibassor, le Premier ministre Ousmane Sonko, s’appuyant sur une déclaration qui lui aurait été transmise sous forme de note établie par le ministre de tutelle de l’administration par son avocat, Me Ciré Clédor Ly, dit que tous les hommes du tribunal se sont retrouvés dans une salle du tribunal de Kaolack pendant près de cinquante-cinq minutes sans pouvoir sortir. Le premier ministre Sonko prend en exemple également les juges du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), depuis la chute du président Macky Sall et le durcissement de l’exercice du pouvoir judiciaire. L’ancien président du Conseil supérieur de la magistrature et ex-président de la Cour d’appel de Kaolack, Ousmane Kane, note que les magistrats intégrés dans le Conseil supérieur de la magistrature sous l’ancien régime ont été remplacés.

« Le Premier ministre s’est trompé car depuis la magistrature réformée présidée par le président Bassirou Diomaye Faye, la dernière à laquelle j’ai pris part, tous les magistrats occupant des postes importants sous l’ancien régime ont été remplacés », dit le nouveau recteur de la Cour suprême.

À la Cour suprême, un nouveau Premier président et un nouveau Procureur général ont été désignés en remplacement de leurs prédécesseurs. À la Cour d’appel de Dakar, le Premier président et son Procureur général ont été remplacés, ainsi que le président de la Chambre d’accusation. Fonctionnant avec des conseillers, le nouveau président du pool financier et procureur de la République du pool financier ont été installés.

À Thiès, le grand instance enchaîne : les juges d’instruction, le procureur de la République et les officiers judiciaires ont tous été affectés. À Kaolack, le Doyen des juges et les officiers judiciaires ont été également remplacés ainsi que le président de la Cour d’appel de Kaolack.

Au tribunal militaire, le ministère de la Justice s’est aussi illustré dans son casting, aujourd’hui fortement malmené par les sites d’information en ligne. Les postes sensibles dans la magistrature sont occupés par des magistrats de son choix.

L’enquête laissera une amertume tenace car un débat sérieux s’en était déjà suivi. Voir aussi le blocage opéré pour éviter une situation plus confuse pour l’institution judiciaire. « Il serait bon (que le Premier ministre Sonko ne prête pas à l’institution judiciaire une vertu qu’elle n’a jamais eue », dit Ousmane Kane.)

Lors de son propos au sujet du ministère de la Justice, « ce qu’a dit mon ami de parti Mor Ly est vrai : il s’est fondé sur les informations obtenues d’un avocat, Me Ciré Clédor Ly, pour appuyer ses propos. Mais son analyse est erronée et mérite d’être replacée dans un cadre juridique strict », dit le magistrat.

À la traditionnelle époque, l’attribution des postes dans la Justice pour les magistrats qui avaient suffisamment de formations solides et une expérience d’altitude n’a jamais souffert d’un manque de respect, d’un manque de loyauté ou d’une absence d’indépendance.

L’administration, l’Opinion, l’attribution des fonctions par les ministres n’ont pas, dans le strict respect de la légalité, servi un quelconque exécutif dans l’ordre privé. Au contraire, contrairement aux autres informations qui circulent, l’ordre social a été fortement préservé. « Voilà pourquoi le Premier ministre Sonko aurait dû s’informer davantage auprès des hommes et femmes qui exercent des responsabilités judiciaires », déclare-t-il.

Pour lui, les faits sont têtus : « Le Premier ministre Ousmane Sonko s’est trompé — ce qui est normal — mais il aurait dû éviter le piège qui consiste à amplifier une parole non vérifiée en validant une information erronée qui prêterait à confusion. »

S’il y a eu une anomalie dans ce qu’a avancé le Premier ministre Sonko, dit-il, « une telle anomalie ne devrait jamais autoriser qu’un magistrat, quel qu’il soit, subisse des attaques publiques alors même qu’il n’a jamais failli à son serment ».

Il rappelle que même si l’on peut parfois être en désaccord avec certaines décisions de justice, il n’en demeure pas moins que l’institution judiciaire ne saurait être l’objet d’attaques publiques non fondées.

« Le Premier ministre Sonko devait s’interdire de s’attaquer publiquement à un corps qu’il a les moyens politiques de réformer pour que les injustices qu’il a vécues durant les dix dernières années ne se reproduisent plus. »

Décidément, poursuit-il, le Conseil constitutionnel et la Cour suprême ont toujours joué leur rôle dans le cadre républicain pour lequel le peuple les a installés.

Ainsi, rappelant qu’il soutient les réformes entreprises par le président Bassirou Diomaye Faye, Ousmane Kane insiste sur la nécessité de respecter la séparation des pouvoirs. « Si le Premier ministre Ousmane Sonko souhaite réformer, il lui appartient d’agir dans le cadre de la loi. »

En conclusion, le magistrat ouvre une parenthèse politique :
« Le Premier ministre doit faire attention à ses déclarations. Le droit pour avancer ne doit pas devenir un instrument politique de destruction de l’État de droit. Son rôle est d’éclairer, jamais de brouiller. »
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