Marchands de paradis : quand certains marabouts transforment la foi en escroquerie (Par Ousmane Ba, activiste )

Mardi 3 Avril 2018

Ils parlent au nom de Dieu.
Ils promettent le paradis.
Ils exigent de l’argent, de la soumission, du silence.
Et pendant que leurs disciples s’appauvrissent, eux prospèrent.
Depuis trop longtemps, une vérité dérangeante est étouffée : certains marabouts ont cessé d’être des guides spirituels pour devenir des commerçants de la crédulité humaine. Ils exploitent la foi, la peur de l’enfer et l’espoir d’une vie meilleure pour bâtir des fortunes bien terrestres, souvent au détriment de ceux qui n’ont déjà presque rien.


Promettre le paradis : une imposture théologique et morale
La première absurdité est flagrante : comment un être humain peut-il promettre le paradis à un autre, alors qu’il ne peut même pas se le garantir à lui-même ?
Qui leur a donné ce pouvoir ?
Quel pacte auraient-ils signé avec Dieu pour distribuer le salut comme une marchandise ?
Toutes les religions enseignent l’humilité, la responsabilité individuelle et la droiture. Pourtant, ces marabouts autoproclamés vendent la certitude absolue. Ils se placent entre l’homme et Dieu, s’érigeant en intermédiaires indispensables, alors même que la foi repose sur une relation personnelle, intime, libre.
La religion appelle à l’élévation morale.
Eux imposent la soumission aveugle.


Quand la foi devient un système de racket organisé
Le mécanisme est toujours le même, parfaitement rodé. Le disciple donne de l’argent, des biens, parfois jusqu’à sa dernière ressource. En échange, on lui promet protection mystique, réussite, guérison, mariage, prospérité ou salut éternel.
Mais lorsque rien ne se réalise, la responsabilité ne revient jamais au marabout. Elle est rejetée sur le disciple :
il n’a pas assez donné,
pas assez cru,
pas assez obéi.
C’est le schéma classique de toute arnaque : le vendeur est infaillible, le client toujours coupable. La foi est ainsi transformée en piège psychologique, où l’échec devient une preuve supplémentaire d’asservissement.


Des marabouts opulents, des disciples sacrifiés
Le contraste est indécent. D’un côté, des marabouts vivant dans le confort, parfois le luxe : grandes maisons, véhicules coûteux, influence sociale, protection tacite. De l’autre, des disciples appauvris, endettés, convaincus que leur souffrance est une étape nécessaire vers le salut.
Si la pauvreté garantit le paradis, pourquoi ceux qui la prêchent la fuient-ils avec autant d’ardeur ?
Si le détachement matériel est une vertu, pourquoi leur accumulation devient-elle une règle ?
Cette contradiction n’est pas accidentelle. Elle est le cœur même de l’arnaque.


La peur comme instrument de domination
Ces faux guides utilisent des armes puissantes : la peur de l’enfer, la menace de malédiction, la culpabilité permanente. Ils conditionnent leurs disciples à obéir, à donner, à se taire.
Penser devient un péché.
Douter devient une offense.
Questionner devient une trahison spirituelle.
Or, une foi qui interdit la réflexion n’est plus une foi. C’est un système de contrôle mental, une prison construite à partir de la peur et de la dépendance.


Le silence complice et la responsabilité collective
Il est essentiel de le dire clairement : tous les marabouts ne sont pas des escrocs. Beaucoup sont sincères, modestes, respectables. Mais tous les escrocs religieux prospèrent grâce au silence, au tabou, à la peur d’être accusé d’irrespect ou de mécréance.
Respecter la religion ne signifie pas accepter l’exploitation.
Craindre Dieu ne signifie pas craindre des hommes.
Fermer les yeux sur ces pratiques, c’est abandonner les plus vulnérables aux prédateurs spirituels.


Briser le tabou pour sauver la foi elle-même
Dénoncer ces dérives n’est pas une attaque contre la religion. C’est au contraire une défense de sa dignité. Dieu n’a jamais demandé que l’on dépouille les pauvres pour enrichir des intermédiaires autoproclamés.
Le paradis n’est pas à vendre.
La foi n’est pas un commerce.
La peur n’est pas une preuve de piété.
Tant que ces marchands de paradis continueront à prospérer sur la misère, l’ignorance et le désespoir, il sera du devoir de ceux qui voient clair de parler. Même si cela choque. Même si cela dérange. Surtout si cela dérange.
 
De Ousmane Ba, Activiste
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