Budget 2026 des Forces armées : entre impératifs sécuritaires, tensions budgétaires et attentes des députés

Samedi 6 Décembre 2025

L’Assemblée nationale a examiné, samedi 29 novembre 2025, le projet de budget 2026 du ministère des Forces armées, arrêté à 437,9 milliards FCFA en autorisations d’engagement (AE) et 338,3 milliards FCFA en crédits de paiement (CP). Une enveloppe en hausse globale de 7 %, mais jugée insuffisante par de nombreux Commissaires au regard de la situation sécuritaire sous-régionale et des défis internes.


Le budget du ministère s’articule autour de quatre programmes : Défense du territoire national : 191,2 milliards FCFA en AE, Pilotage, coordination et gestion administrative : 134,9 milliards FCFA en AE, Sûreté publique et maintien de l’ordre : 111,6 milliards FCFA en AE, Opérations à caractère industriel et commercial : 150 millions FCFA. Les dépenses d’investissement dominent largement les prévisions, avec plus de 125 milliards FCFA inscrits dans le programme de pilotage, notamment pour les infrastructures, l’équipement militaire et l’achèvement de projets stratégiques.

Des députés préoccupés par la sécurité régionale et les moyens de l’armée
Dès l’ouverture des débats, plusieurs Commissaires ont rappelé « l’importance singulière de ce département pour la paix, la stabilité et l’intégrité du territoire », saluant au passage « nos vaillants soldats, derniers remparts contre l’insécurité ».

Mais les inquiétudes n’ont pas tardé à émerger. Beaucoup ont pointé la hausse budgétaire qualifiée de trompe-l’œil, soulignant que « des baisses significatives apparaissent dans des rubriques essentielles », alors que les attaques djihadistes aux frontières « se rapprochent dangereusement du territoire sénégalais ».

Certains élus ont insisté sur la présence massive d’étrangers circulant « avec pour seule pièce d’identité leur carte nationale », un phénomène jugé préoccupant à proximité des zones frontalières. Ils ont plaidé pour « le renforcement urgent du dispositif de surveillance », notamment à la frontière avec le Mali.

Casamance, régularisation des motos, brigades manquantes : une liste d’attentes croissante
Le dossier casamançais est revenu dans les échanges, notamment la situation d’un soldat porté disparu. Des députés ont demandé si la famille du militaire avait été accompagnée, tout en réclamant un point complet sur « l’état du processus de paix en Casamance ».

Les élus ont également dénoncé les difficultés des brigades de Gendarmerie dans plusieurs localités, évoquant des véhicules immobilisés « faute de carburant », et réclamant de nouvelles infrastructures à Kaffrine, Gniby, Niodior ou Medina Yoro Foulah.

Autre sujet très débattu : la présence massive des motos dites Jakarta, qualifiées de « véritable menace pour la sécurité intérieure ». Les élus ont réclamé l’accélération de leur régularisation.


Les députés ont insisté sur les conditions de vie et de travail au sein des camps militaires. Le manque d’eau au camp Général Idrissa Fall a particulièrement retenu l’attention. De nombreux élus ont demandé des explications sur l’état des infrastructures, l’indemnisation des anciens combattants, ou encore les retards de paiement pour certains militaires invalides.

Ils ont également interpellé le gouvernement sur la vétusté du camp d'entraînement de Thiaroye et l’état d’exécution des mesures annoncées pour la commémoration de Thiaroye 44, notamment l’érection d’un mémorial.

Le ministre rassure : « La sécurité est une affaire de population autant que de techniciens »
Face aux inquiétudes, le ministre des Forces armées, Birame Diop, a tenu à rassurer les députés. Selon lui, « la sécurité, au-delà d’être une affaire de techniciens, est une affaire des populations ». Il a rappelé que la sécurité moderne est « humaine, économique, sanitaire, alimentaire et environnementale », nécessitant une approche globale.

À propos du soldat disparu en Casamance, il indique que « les autorités sont en train de tout mettre en œuvre pour obtenir sa libération ». Sur le manque d’eau au camp Idrissa Fall, il a évoqué « des négociations en cours pour que les nouveaux forages puissent desservir l’ensemble du camp », assurant que la situation « sera très bientôt un lointain souvenir ».

Concernant le camp militaire Geille de Ouakam, il a confirmé son affectation au FONSIS : « La décision a été prise par le Chef supérieur des Armées, après concertation ».

Paix, coopération régionale et lutte contre le terrorisme
Le ministre a insisté sur la nécessité d’une réponse panafricaine au terrorisme : « Aucun pays ne peut lutter seul contre ce fléau ». Il a rappelé l’importance du soft power, citant ses propres mots : « Une distribution injuste de la souffrance crée un terreau fertile pour l’extrémisme violent ». Il a également salué la collaboration accrue avec l’armée malienne dans le cadre de la commission mixte militaire.

Armée française, nouveaux matériels et programmes éducatifs
Sur l’impact du départ partiel des troupes françaises, le ministre a affirmé que « l’armée sénégalaise a toujours été entièrement responsable de la sécurisation du pays ». Il a toutefois admis qu’un départ massif « aura un impact économique ». Il a annoncé également l’inauguration prochaine de l’usine d’assemblage des véhicules tactiques de Diamniadio, attendue pour mi-décembre, ainsi que la montée en puissance des hôpitaux militaires de proximité et des Lycées Nation-Armée pour la Qualité et l’Équité (LINAC).


À l’issue des débats, les députés se sont déclarés « satisfaits des réponses apportées » par les ministres des Forces armées et des Finances. La Commission a adopté à la majorité les programmes budgétaires, recommandant leur validation en plénière.
 
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