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ANALYSE : Une autre lecture des opérations russes en Ukraine (Par Mamadou Mouth BANE)

Mardi 26 Avril 2022

ANALYSE : Une autre lecture des opérations russes en Ukraine (Par Mamadou Mouth BANE)

Les opérations militaires russes résultent d’un ensemble de faits dont les explications sont à trouver dans la volonté occidentale de traduire la Russie, en un micro Etat à la taille de la Palestine actuelle dont les limites territoriales se rétrécissent d’année en année.
 
Ce plan d’isolement économique, financier, politique, commercial, diplomatique, militaire, sportif, mis en œuvre depuis février 2022, contre Moscou, en est le dernier jalon. D’ailleurs, le refus des pays occidentaux d’homologuer le vaccin russe anti covid-19, Sputnik, était une alerte, de ce que le monde vit aujourd’hui, sur fond de rivalité entre les grandes puissances.
 
Même le chinois Sinopharm subit cet ostracisme sanitaire dans l’espace européen. Par exemple, les passagers qui ont pris le vaccin russe ou chinois n’étaient pas autorisés à entrer sur le territoire européen pour des raisons purement politiques. Il fallait prendre les vaccins produits par les laboratoires occidentaux comme Johnson Johnson, Pfizer, Astrazeneca etc… pour entrer en Europe. Même le Sénégal n’a pas osé accepter des dons de vaccins Sputnik faits par la Russie, par crainte d’être pointé du doigt d’être du côté de Poutine.
 
L’effondrement de l’URSS n’a pas suffi pour satisfaire l’envie de l’occident de voir la Russie disparaitre de la carte. L’isolement de ce pays dans les relations internationales, les mises en garde adressées aux dirigeants du monde qui ont osé s’allier avec Moscou (l’exemple du Mali et de la Centrafrique), les menaces contre certains pays qui ont refusé de condamner les opérations russes en Ukraine, dévoilent le plan de l’Europe/OTAN «l’EurOtan» à vouloir bâtir un monde unipolaire dominé par la vision occidentale. 
 
Depuis la révolution de Maïdan en 2014, tous les éléments étaient réunis pour pousser la Russie à lancer une offensive en Ukraine. La nomination d’une diplomate américaine Nathaly Yaresko, naturalisée ukrainienne au poste de Ministre des Finances a été un acte fort confirmant l’influence de Washington dans la politique intérieure de ce pays.
 
Alors, le président Poutine pouvait-il continuer à croiser les bras face aux exactions récurrentes des milices de Kiev contre les populations russophones dans le Dombass ? En outre, pourquoi Kiev et ses alliés, notamment la France, ont volontairement détourné leur regard des accords de Minsk qui ont fait l’objet d’une résolution aux Nations Unies ?
 
Selon l’ancien Colonel suisse Jacques BAUD spécialiste du renseignement et auteur du livre : «Poutine, maître du jeu ? » : «les américains ont utilisé les ukrainiens pour leur propre politique. Les américains savaient que Moscou ne pouvait pas rester insensibles aux offensives ukrainiennes contre les russophones dans le Dombass».
 
L’Ukraine qui n’est pourtant pas membre de l’Union européenne encore moins de l’OTAN, avait accepté d’abriter les bases des forces militaires de «l’EurOtan». Seulement, pour Poutine, il est hors de question d’accepter l’installation de bases de missiles nucléaires en terre ukrainienne à 700Km de Moscou voir moins. La sécurité intérieure de la Russie est en jeu. Puisque l’Ukraine ne veut pas adopter une position neutre dans ce que l’on peut qualifier pour l’instant de « guerre froide » ou tiède.
 
Au plan géopolitique, l’Ukraine tout comme l’Israël, est un pays très important dans la stratégie américaine d’affaiblissement de Moscou et de ses alliés en Europe de l’Est. Maintenant, Washington cherche  à tout prix, à étouffer la Russie en attendant de trouver un adversaire politique plus docile pour succéder à Vladimir.
 
Du coup, le retard de l’accession au pouvoir de l’opposant russe pro-européen Alexy NAVALNI, est aussi un frein aux plans de parachèvement du processus d’éclatement de la Fédération russe et de sa mise sous la tutelle de «l’Eurotan».
 
Toutefois, l’arrivée du pro-européen Zelensky au pouvoir à Kiev, a été le coup d’accélérateur à la détérioration des relations russo-ukrainiennes.
 
Aujourd’hui, NAVALNI et Zelensky sont les deux acteurs positionnés en Ukraine et en Russie pour pousser Poutine vers la sortie afin d’opérer un contrôle définitif sur ce pays.
 
Cependant, pour le moment, le président russe empêche «l’EurOtan» d’atteindre ses objectifs stratégiques sur l’axe Russie, Chine, Iran, avec l’enjeu principal de l’accès à la mer Caspienne et à la mer Noire.
 
Et, il est évident que, la longévité de Poutine à la tête de la Russie demeure une préoccupation majeure pour les Occidentaux qui ont tout tenté pour le renverser même par la rue.  D’ailleurs, la «Révolution orange» qui a emporté des pouvoirs en Europe de l’Est a été un échec à Moscou malgré les manipulations tentées avec la jeunesse proche de l’opposition. Ce revers a été également remarqué au Moyen-Orient, lorsque le «Printemps arabe» d’inspiration occidentale a mis un terme à  plusieurs régimes sauf à celui de Bachar Al Assad président de la Syrie, qui doit son salut à Vladimir Poutine.
 
Le jeu d’équilibre que le président russe apporte dans les relations internationales fausse tous les schémas des Américains et de leurs alliés. Sur la question de l’homosexualité, Poutine a pris le contrepied de Barack Obama ancien président des Usa, de Charles Michel président du Conseil de l’Union Européenne, de Justin Trudeau Premier ministre du Canada. Et, par rapport à l’Islam, le président russe s’est démarqué des dirigeants qui veulent combattre les musulmans dans leurs pays par des lois anti islam.
 
ISLAM FAIT PARTIE DES INSTITUTIONS RUSSES
 
Jusque-là, il restait à faire l’analyse de la crise entre l’Ukraine et la Russie sous l’angle religieux. Le conflit entre Moscou et «l’EurOtan» devrions-nous dire, pour mieux cerner le sujet dans un cadre plus global. Vladimir Poutine et l’Occident ne s’opposent pas uniquement sur le terrain militaire et/ou géopolitique. Cette crise jouxte les contours d’une nouvelle Civilisation que l’Europe et les Etats-Unis veulent instaurer.
 
Cette Civilisation qui cache dans ses objectifs stratégiques, la lutte contre l’influence de l’Islam dans le monde, pour l’instauration d’un monde sur fond d’égalité homme-femme, la promotion des LGBT par l’invention d’un 3e sexe. Sont-ils d’ailleurs, les fondements du fameux «Nouvel Ordre Mondial » (NOM), tel que pensé par les thinks tanks EU/USA ? Sans nul doute, l’Islam et la Russie sont au cœur des préoccupations de ces maîtres occidentaux qui gouvernent le monde.
 
L’Occident a tout simplement remarqué la proximité des positions entre les dirigeants de la Russie et les Musulmans dans la défense des principes moraux. Il faut dire que dans la lutte contre la dépénalisation de l’homosexualité, pour un monde de liberté et de tolérance religieuse, dirigeants russes et Musulmans se retrouvent.
 
La Russie fait partie des pays les plus islamisés au monde, avec 30 millions de musulmans (deux fois la population sénégalaise) à majorité sunnite. En 2015, Vladimir Poutine a inauguré la plus grande mosquée d’Europe. Pour rappel, ce grand événement de l’Islam a été célébré en présence du président turc Tayyip Erdogan qui rêve d’un sultan du monde musulman, de Mahmoud Abbas président de la Palestine et de tous les Khalifs musulmans russes.
 
Arrêtez un instant pour se demander pourquoi, les dirigeants du monde, les organisations internationales et les média occidentaux qui aujourd’hui, condamnent et sanctionnent la Russie, ne s’opposent pas avec la même tonalité aux exactions israéliennes contre les Palestiniens ? Est-ce par opposition à la politique américaine contre la Palestine, que le président russe avait invité Abass lors de cette inauguration ?
 
En tout état de cause, Vladimir Poutine est en train de bâtir une nouvelle alliance mondiale avec des dirigeants de la Ummah islamique pour endiguer la propagation de cette pandémie de LBGT, combattre l’islamophobie et la domination de l’Occident.
 
Lors de l’ouverture de la grande mosquée de Moscou, le président russe a déclaré : «Cette mosquée sera une source pour propager les idées humanistes et les vraies valeurs de l’islam».
 
A travers ces mots, Poutine fait preuve d’ouverture, d’acceptation de la différence religieuse qui est un facteur déterminant dans la construction d’une Russie unie et forte, dans un monde beaucoup plus tolèrent. «La Russie est un pays multiconfessionnel dans lequel, et je tiens à le souligner, l'islam est une des religions traditionnelles» avait poursuivi le président russe.
 
A l’instar des pays musulmans et conformément aux principes islamiques, l’homosexualité est sévèrement punie en Russie. La FIFA avait d’ailleurs menacé de retirer l’organisation du Mondial 2018 à ce pays, à cause du refus des autorités de suspendre les lois contre les LGBT. Ensuite, les multinationales comme Coca Cola et Mc Donald avaient brandi une menace de suspension de leurs contrats de sponsoring pour le Mondial 2018. Toutefois, Poutine était resté ferme dans sa position malgré les pressions médiatiques de Human Rights Watch.
 
Après avoir domestiqué toutes les organisations internationales : FIFA, FIBA, IAAF, OMC, OMS, Banque Mondiale, le FMI, UNESCO, Unicef, Nations Unies, OCDE, les finances internationales, TOTAL, Shell, les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), les grands groupes de presse de masse, les grandes Banques et le système Swift, les Sociétés d’assurance, la Justice internationale etc., les Occidentaux cherchent maintenant à isoler Poutine et à circonscrire l’influence de l’Islam. Ils misent aussi sur une situation insurrectionnelle en Russie, pour exiger l’arrêt des opérations, pour provoquer l’affaissement de la Fédération russe et le départ de Poutine qui, tout de même, bénéficie du soutien renouvelé de ses concitoyens.
 
Par contre, dans les pays sous-développés, surtout en Afrique, les Occidentaux accélèrent leur stratégie de dépénalisation de l’homosexualité. Ce qui passera par une conditionnalité de l’aide publique au développement.
 
Le brassage des religions en Russie est tout simplement exemplaire. Dans ce pays est appliquée une politique d’intégration des musulmans dans la société à rebours à certains pays de l’Union européenne où l’extrême droite menace la cohésion sociale et la liberté confessionnelle.
 
En effet, les autorités saoudiennes viennent de publier les quotas des pèlerins pour le Hadji 2022 pour l’ensemble des pays. Avec 11.318 pèlerins autorisés, la Russie devance l’ensemble des pays membres de l’Union européenne.  L’Ukraine est à 91 pèlerins, 9 504 pour les Etats-Unis et 9 268 pour la France. Ensuite, 970 pour l’Espagne, 2 090 pour l’Australie, 45 pour le Portugal, 579 pour le Danemark ; 1 182 pour la Suède ; 4 125 pour l’Allemagne, 342 pour la Norvège, 619 pour L'Autriche, 9 504 pour les Etats-Unis ; 223 pour le Japon ; 181 pour la Grèce ; 204 pour l’Irlande 1 351 pour l’Italie, 1 499 pour la Belgique ; 362  pour la Bulgarie, 136 pour la Hollande.
 
 
Rappelons qu’avant la Covid-19, ils étaient 23.000 musulmans russes à faire le pèlerinage.  L’influence de l’Islam sur l’Europe hante le sommeil des dirigeants occidentaux qui inventent des lois qui stigmatisent les musulmanes.
 
Le musulman est plus à l’aise en Russie que dans n’importe quel autre pays de l’Europe. Ceci est un fait confirmé par une politique portée par une vision, celle de Poutine acceptée par les communautés dans leur diversité. 
 
A propos de l’Islam, les perceptions sont totalement différentes entre celle du président russe et de ses homologues européens ou américains. «L’islam est un élément très important de l’ADN culturel de la Russie, une partie intégrante et organique de l’histoire de la Russie. Nous connaissons et gardons en mémoire de nombreux noms de musulmans qui ont fait la gloire de notre patrie » a déclaré  Vladimir Poutine en 2013 lors de la réunion tenue à l’occasion du 225e anniversaire des Directions spirituelles centrales des musulmans de Russie.
 
Ces propos de Vladimir Poutine sont étayés par Imam Muhammad al-Bukhari qui est l’une des principales références dans l’Islam. Al Bukhari est né le 20 Juillet 810 à Khorassan ville d’Ouzbékistan devenu membre de la République soviétique en 1924 avant d’obtenir son indépendance en 1991, à la suite de la dislocation de l’URSS. C’est alors une grande partie de l’Histoire de l’Islam dont les racines sont profondément enfouies dans les terres anciennes de la Russie.
 
«Il est vrai que si l’islam de Russie n’a souvent été perçu qu’à travers le prisme déformant des deux guerres de Tchétchénie, de l’islamisme radical et du terrorisme, la réalité est bien plus complexe. Non seulement l’islam fait partie intégrante de l’histoire et de la culture de la Russie, mais il s’est étendu au-delà de ses régions ancestrales (le Caucase du Nord et la région Volga-Oural) pour devenir un phénomène panrusse. » dit la note de «l’Ifri» de n°125 de Décembre 2021 intitulée : «Islam de Russie : équilibrer sécurisation et intégration ».
 
L’épanouissement des musulmans en Russie a fini de faire de l’Islam, un signe particulier de l’identité de la Russie. A l’occasion des prêches dans les mosquées et les débats dans  d’autres lieux de cultes musulmans, la langue russe sert d’instrument de communication. Ce qui crée un renforcement des liens entre les citoyens toute obédience religieuse confondue.
 
 
Il faut rappeler que «lors des dernières élections présidentielles et législatives, les musulmans avaient massivement voté pour Poutine. Aux quatre dernières élections présidentielles, Vladimir Poutine (Dmitri Medvedev en 2008) a obtenu en moyenne 88,5 % des suffrages exprimés dans les républiques musulmanes Tchétchénie, Ingouchie, Daghestan, Kabardino-Balkarie, Tatarstan et Bachkortostan, contre 67 % à l’échelle nationale ».
 
«Le fait que le président du Forum musulman européen soit un citoyen russe converti à l’islam, Abdul-Wahed Niazov, n’est que la partie émergée de l’iceberg de cette européanisation croissante de l’islam dans laquelle la Russie est un acteur fondamental. Cette nouvelle tendance a été mise en évidence lors du 14e Forum musulman international de Paris, organisé par les muftiats russes en 2018, au cours duquel les délégués russes ont présenté la Russie comme un hub donnant aux musulmans européens la possibilité d’accéder à l’Oumma mondiale, de construire une économie respectueuse des normes halal ; et de s’inspirer du modèle russe de concorde multireligieuse conservatrice pour se sentir « chez eux » en Europe » apprend-t-on lors du 14e Forum international des mufti russe tenu à Paris.
 
 
Les autorités russes semblent avoir bien compris l’importance de la potentialité économique de la Ummah islamique pour leur pays. Déjà, la Ligue arabe, les pays membres de l’Organisation pour la Conférence Islamique (OCI), l’Afrique musulmane, etc., constituent un potentiel marché de plus d’un milliard de personnes pour les entreprises russes.
 
Alors, aujourd’hui, c’est une évidence de dire que, ce qui est qualifié de provocation de «l’EurOtan» contre la Russie, par des initiatives qui menacent la sécurité intérieure de Moscou, touche directement les musulmans de ce pays.
 
 
« Selon des spécialistes dont la compétence ne fait aucun doute, dans 15 ans, environ 30% de la population russe sera musulmane », a déclaré en 2019 Ravil Gaïnetdine, l'un des responsables musulmans du Conseil russe des muftis. Dans les analyses prospectives, les dirigeants de l’OTAN ne voudraient pas que la Russie détentrice de l’arme nucléaire, soit, un jour, dirigée par un musulman à l’image du Pakistan. Et pourtant, les probabilités sont assez fortes  au vu de la cohésion confessionnelle qui existe en Russie entre les chrétiens orthodoxes et les musulmans, tous impliqués dans le jeu politique national.
 
Disons que, si les Américains ont été capables de surmonter leurs contradictions raciales jadis très profondes, pour élire un président noir, il y a de fortes possibilités que la Russie, pays de l’Imam Al Bukhari, soit un jour dirigée par un musulman.
 
Ce serait d’ailleurs un événement banal, vu l’entente et la complicité qui cimentent les relations entre les différentes religions du pays.  
 
Mamadou Mouth BANE
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